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VyYTICAN (CONC. DU). FORMULES SUCCESSIVES

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au préalable défini. Pour son compte, il tenait pour certain que le pape était infaillible dans les faits dogmatiques, les canonisations, etc. Il souhaitait ardemment que le concile pût un jour définir cette infaillibilité de l’Église, non seulement dans les définitions dogmatiques proprement dites, mais encore dans les faits dogmatiques, la canonisation des saints, l’approbation des ordres religieux. Mais, puisque l’on avait voulu parler de l’infaillibilité du pape avant de traiter de l’infaillibilité de l’Église, le projet avait l’inconvénient de dire plus qu’il ne fallait. Le cardinal président remit la discussion au soir. À cette 40e réunion, lecture fut donnée de la rédaction amendée et proposée avant la séance au cardinal président par Mgr Martin. Le cardinal Bilio fit alors remarquer que, soit avant l’explosion du jansénisme, soit depuis, soit même récemment, les théologiens de marque n’avaient défendu l’infaillibilité pontificale que dans les définitions dogmatiques. Plusieurs membres de la commission, désireux de rallier la minorité, abondèrent dans le sens du cardinal. On se sépara sans rien conclure.

A son tour, à la 41e réunion, le P. Schrader intervint pour proposer une nouvelle formule ainsi libellée :

Romanum pontificem errare non posse, cum supremi omnium christianorum doctoris munere fungens pro apostolica sua auctoritate définit quid in rébus fidei et morum ab universa Ecclesia fide divina credendum vel tanquam fidei contrarium rejiciendum sit.

Elle ajoutait un mot sur l’irréformabilité de ces jugements et terminait en déclarant que cette infaillibilité du pape était la même que celle de l’Église, qu’elle s’étendait au même objet nempe ad fidei depositum custodiendum inlemeraleque exponendum. Ibid., col. 251 BC. Malgré des divergences de vue assez notables, le cardinal déclara, avec un empressement dont s’étonne l’évêque de Ratisbonne, que la formule était adoptée par l’unanimité des présents, sauf deux. Ibid., col. 282 D.

Rien n’était encore définitif. Le débat toutefois approchait de son dénouement à la commission. Le 7 mai, à la 42e réunion, lecture est faite du projet amendé, lequel est adopté après quelques légères modifications. Il reste toutefois une difficulté ayant trait à l’extension de l’infaillibilité. Le texte ainsi donné de la l re constitution De Ecclesia, c’est-à-dire tel qu’il est sorti des délibérations du 7 mai, sera imprimé pour être distribué aux Pères et c’est le texte lui-même que, le 9 mai, ils auront en mains, sauf quelques modiques changements. Le lendemain, à leur 43e réunion, les théologiens discutèrent les observations présentées par les Pères. Voici comment, dans cette nouvelle rédaction, se terminait le chapitre : definimus hanc infallibilitalem ( R. pontificis) etiam ad unum idemque objectum sese extendere ac (Ecclesiæ infallibilitas). Les mots ad fidei depositum, etc., avaient disparu. Ibid., col. 255 D ; cf. t. lii, col. 7 B. La commission reprendra ses délibérations le 22 mai pour guider et contrôler celles des congrégations générales dans le grand débat sur les quatre chapitres relatifs à la papauté. À cette réunion, se rattache une nouvelle motion du cardinal Bilio proposant qu’une sorte de prologue historique soit mis en tête du c. iv, montrant de quelle manière les papes ont tous exercé dans l’Église le magistère de la foi. Dans la pensée du cardinal le prologue en question couperait court à l’idée fausse que les pontifes romains dans les jugements en matière de foi pourraient procéder absque consilio, deliberalione et scienliæ subsidiis. M.-P., t. lui, col. 283 D.

On sentait bien chez le président le désir de se montrer conciliateur en réduisant le plus possible le

domaine de l’infaillibilité et en précisant les conditions de son exercice. Cette modération était mal vue par les plus intransigeants des infaillibilistes. À la nouvelle de ce qui s’était passé au sein de la commission, beaucoup déclarèrent que le projet des théologiens avait été non amendé, mais déformé. On se promit bien de rejeter la nouvelle formule. Journal de Senestrey, ibid., col. 283 B. Ce fut néanmoins une formule toute proche de celle-ci qui finalement l’emporta comme nous le dirons plus loin.

2. La discussion générale.

C’est le 13 mai que s’ouvrit, dans la seconde partie de la 30e séance, la discussion du projet distribué aux Pères le 9 mai et qui portait désormais le titre de l re constitution De Ecclesia. On avait bien demandé qu’il y eût deux débats distincts, l’un sur les trois premiers chapitres qui soulevaient relativement peu de difficultés, l’autre sur le c. iv, traitant de l’infaillibilité. La direction du concile s’en tint à un seul débat, mais, en fait, dans la discussion générale, on ne parla pas des deux premiers chapitres, le c. m fut seulement touché, le fort des débats porta sur le c. iv.

Le rapport général était présenté par Mgr Pie, qui commença par un appel à la concorde. Parlant de l’infaillibilité, il conclut qu’il était urgent de la discuter ; le silence créerait à son endroit un préjugé défavorable. La formule apportée par la commission était bien nettç, elle déterminait les conditions extérieures que devait remplir la pape, pour jouir de cette prérogative : il devait parler comme docteur suprême, le faire en vertu de son autorité apostolique, et dans des questions relatives à la foi et aux mœurs. M.-P.. t. lii, col. 29-37.

La discussion générale ainsi inaugurée par ce rapport ne prit pas moins de quatorze séances et ne fut clôturée que le 3 juin (04e s.). La plupart des orateurs qui prirent la parole au début de la discussion générale faisaient partie de la minorité. C’est ainsi que l’on entendit Mgr David (Saint-Brieuc) et le cardinal de Schwarzenberg, qui, non sans raison — on s’en était déjà aperçu au sein de la commission — signalèrent l’illogisme qu’il y avait à discuter des pouvoirs du pape avant d’avoir mis au clair la doctrine générale de l’Église. D’autres firent valoir les raisons d’inopportunité, en insistant, ce fut le cas de Mgr Hefele, à la 52e séance, sur les difficultés historiques qu’il y avait à résoudre : « Je déconseille, disait-il, la définition en raison des dangers immenses qu’elle renferme en elle-même, ensuite parce qu’elle élève un obstacle redoutable à la conversion des séparés et enfin parce que la théologie et l’histoire sont contre elle. » II protestait aussi contre un argument qui se répétait dans les rangs de la majorité : la doctrine de l’infaillibilité est révélée, disait-on ; donc les faits contraires ou ne sont pas vrais ou peuvent être mis d’accord avec elle. C’était là, disait non sans raison l’évêque de Rottenbourg, « supposer comme certain ce qui était à prouver et présenter comme admis ce que nous nions ou ce dont nous doutons à bon droit ». M.-P., t. lii, col. 80-84.

Trois évêques opposants se signalèrent encore par leur énergie : Mgr Las Cases (Constantine), Mgr Strossmayer, qui fit un très beau discours (63e s., 2 juin) et Mgr Maret (64e s., 3 juin). Mais ce fut Mgr Darboy (Paris) qui parla avec le plus de force contre l’opportunité (55e s., 20 mai). II critiqua vivement l’origine du projet : la question de l’infaillibilité n’avait pas été posée par la bulle de convocation ; c’étaient des prêtres, voire des laïques, qui avaient soulevé le débat, ce qui avait amené un bouleversement de l’ordre des travaux. Quant à la formule dogmatique proposée — et le travail de Pénélope fait sur le texte le montrait bien — elle était loin d’être par-