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    1. UNIGENITUS (BULLE)##


UNIGENITUS (BULLE). A L’ASSEMBLÉE DU CLKRGÉ

instruire les fidèles contre les attaques des jansénistes. Pour Noailles et ses huit adhérents, l’instruction devait être détaillée et s’appuyer sur L’Écriture et les Pères, car les évêques devaient parler en évêques et l’instruction devait surtout expliquer la bulle.

Rohan rédigea une instruction et Bissy en composa une autre. Les deux prélats combinèrent leur travail, le 3 janvier 1714, et, dès le lendemain, à l’archevêché, Noailles entendit la lecture de l’instruction ainsi arrangée. Il demanda des corrections, qui furent toutes accordées, dit Lafitau.

L’Instruction pastorale que les jansénistes ont si vivement attaquée (Procès-verbaux, col. 1260-1299) expose et réfute les sentiments de Quesnel sur la grâce nécessitante, sur les vertus théologales et la lecture de l’Écriture sainte en langue vulgaire. Elle établit la vérité, la visibilité, l’autorité et la sainteté de l’Église, la discipline et l’obéissance due à l’Église. L’instruction n’a d’autre but « que de faciliter aux fidèles l’intelligence de la bulle et de les prémunir contre les mauvaises interprétations par lesquelles des personnes malintentionnées tâcheraient d’en obscurcir le vrai sens… ». Noailles refusa de signer cette lettre.

Pour qu’il n’y eut pas de surprise, au jour de l’assemblée générale, Rohan convoqua chez lui tous les députés. Les lettres que le P. Timothée écrivit pour lors à Clément XI, mettent en relief les efforts de Rohan et de Bissy pour obtenir l’unanimité des évêques et vaincre l’opposition de Noailles et de ses amis.

Comme Noailles aurait voulu un Précis de doctrine, le roi consulté repoussa cette demande, car ce précis serait « une pomme de discorde » ; d’ailleurs, une dépèche de Rome au nonce, à la date du 6 janvier, rappelait au roi sa promesse de faire accepter la bulle purement et simplement. Après l’acceptation, les évêques pourraient, s’ils le jugeaient à propos, faire des discours, dresser des instructions pour les fidèles ; pour excuser les retards, on pourrait dire qu’on s’était employé à concerter les instructions et mandements que les évêques voulaient publier dans leurs diocèses. L’autorité pontificale serait blessée, si on disait que ces longs délais avaient été employés à examiner la bulle.

Le vendredi 13 janvier, Noailles convoqua les sept évêques qui étaient d’accord avec lui, contre la majorité et ils décidèrent de dresser une Déclaration pour expliquer à leurs confrères qu’ils se séparaient d’eux : ils demandaient des explications, parce que la bulle est obscure et on ne peut l’accepter qu’avec des explications. Les évêques sont les juges de la foi : « Nous demandons qu’on ne donne pas à la Cour de Rome une juste raison de croire que nous n’agissons que comme de simples exécuteurs de ses décrets. » « Il n’y a entre nous (et les autres évêques) aucune contestation sur les vérités de la foi ; nous sommes tous d’accord de condamner non seulement les hérésies proscrites dans les cinq fameuses propositions, tirées du livre de Jansénius, mais encore toutes les autres erreurs que nous croyons que le pape a condamnées par sa constitution. Il s’agit donc uniquement de savoir si les évêques doivent parler comme ils pensent. » Ils sont décidés à proscrire le livre des Réflexions, et, pour cela, ils sont unis au pape dans le principal objet de la bulle. Cette lettre est signée du cardinal de Noailles, de l’archevêque de Tours et des évêques de Verdun, Laon, Chalon-sur-Saône, Boulogne, Auxerre et Bayonne.

Les évêques de l’assemblée protestèrent contre les ternies de cette lettre et contre la lettre que les opposants envoyèrent aux agents du clergé, pour indiquer les motifs de leur séparation. Le roi apprit cette

réunion des évêques opposants et il fit aussitôt écrire à Noailles pour lui ordonner de se trouver avec ses amis à l’assemblée des évêques, pour y exposer leurs raisons, « avec toute liberté d’expliquer leurs sentiments ». L’assemblée générale eut lieu le lundi 15 janvier, à l’archevêché. Les dissidents y assistèrent, « mais en simples témoins », écrit Joly de Fleury ; les évêques étaient au nombre de cinquante. Le cardinal de Rohan exposa, en détail, les travaux de la commission et les justes raisons qui avaient fait condamner le-livre de Quesnel ; il rappela que Bossuet avait tenté de corriger ce livre, mais qu’il avait avoué, depuis, qu’il n’était pas possible de le faire et qu’il fallait le refondre d’un bout à l’autre ; ces efforts reconnus inutiles condamnaient le livre des Réflexions. Puis Rohan résuma les objections faites à la bulle : elle était trop chargée ; elle condamnait des propositions corrigées dans les plus récentes éditions ; quelques propositions condamnées étaient susceptibles d’un sens catholique et quelques-unes se trouvaient en propres termes ou en termes équivalents dans les saints Pères et chez saint Augustin… Rohan répondit qu’il était nécessaire de condamner les différentes erreurs répandues dans ce livre, même dans des éditions anciennes, toujours en circulation ; les propositions condamnées étaient au moins dangereuses, équivoques et susceptibles d’un mauvais sens, à cause de leur ambiguïté ; il était légitime de les proscrire surtout dans un livre à l’usage du peuple ; d’ailleurs, les hérétiques ont coutume d’emprunter des expressions aux Pères, et des disputes récentes avaient prouvé qu’on avait employé ces expressions dans des sens condamnables. Rohan justifiait les condamnations globales des propositions contre des novateurs subtils qui ne cherchent qu’à provoquer des discussions, afin d’insinuer artificieusement les erreurs qu’ils voulaient enseigner : la multitude des propositions, l’ambiguïté et les termes captieux de plusieurs d’entre elles, la diversité des matières, la disposition des esprits, l’indocilité et l’ardeur d’un parti qui ne cherche qu’à écrire et qu’à disputer sur tout, le zèle de certains théologiens qui, en combattant les nouveautés, poussent leur censure trop loin ; tous ces motifs ont déterminé le souverain pontife, dans un jugement semblable, à se conformer à la forme du concile de Constance. Le concile de Constance contre les erreurs de Wiclef et de Jean Huss, la constitution de Pie V confirmée par plusieurs papes, les deux bulles contre Molinos et contre les Maximes des saints fournissent des exemples authentiques de condamnations portées sans des qualifications respectives (Thuillier, ibid., p. 244). Toutes les propositions sont condamnables et la bulle censure des propositions dangereuses. Est-il nécessaire de déclarer jusqu’à quel point elles sont condamnables ? Ne suffit-il pas de prononcer que toutes doivent être bannies ?

L’abbé de Broglie lut ensuite la constitution elle-même et Rohan indiqua les conclusions de la commission. Après avoir lu les mémoires d’auteurs connus ou inconnus, après avoir consulté les théologiens de toutes les écoles, la commission est convenue : 1. que des cent une propositions condamnées il n’en est aucune, qui ne mérite quelqu’une des qualifications exprimées dans la bulle ; 2. qu’il n’y a aucune des qualifications, qui ne se puisse appliquer avec justice à quelqu’une ou à plusieurs des propositions du livre de Quesnel. Rohan analysa ensuite chacune des propositions et réfuta les raisons par lesquelles Quesnel, dans ses mémoires, avait prétendu les justifier. Rohan acheva la lecture du rapport, le lundi 22 janvier, après six séances entières.

A la demande de Noailles, le cardinal de Rohan exposa l’avis de la commission : l’assemblée doit