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UBIQUISME — ULFILA

Chemnitz : il réclame pour l’humanité du Christ terrestre une présence intime, passive — præsentia intima — dans le Logos, présence qui la met en contact avec toutes choses. Mais cette présence intime s’extériorise et devient en quelque sorte active — prmsentia extima — dans l’état d’élévation de la nature humaine à la gloire. Cf. Steitz, art. cit. Transsubstanliatio und Ubiquilàt, p. 599 sq.

Trois écoles se partagèrent alors l’enseignement ubiquitaire. Les théologiens de Tubingue y apportaient une énergie qui ne reculait pas devant les conséquences extrêmes. Pour eux, l’omniprésence, comme les autres qualités divines, appartenaient à la nature humaine dès sa conception et le Christ n’en faisait usage qu’en secret, xpû+iç rîjç xpV ea> Ç-Ainsi, présent dans le sein de la Vierge localiter, il l’était aussi dans le sein de toutes les vierges, dans tous les hommes, femmes et enfants, mais non localiter, c’est-à-dire indistanter. Cf. A. Tholuck, Geist der Theologen Wittenbergs, Berlin, 1852, p. 14. Les théologiens de Giessen ne demandaient l’omniprésence pour le Christ qu’à partir de la glorification, c’est-à-dire de l’ascension. Jusque là, le Christ s’était dépouillé de ses qualités divines, xévaxjtç t^ç xpT)asoç. L’omniprésence n’est ainsi que la participation active de la nature humaine à l’omniprésence de la nature divine en vue du gouvernement du monde qui lui incombe, omniprœsentia modificata seu operosa. Enfin les théologiens d’Helmstœdt restreignaient l’ubiquité du Christ à une omniprésence respective. Le Christ pouvait, selon sa nature humaine, être présent là où il le voudrait ; il est présent actuellement là où il l’a promis et voulu, c’est-à-dire dans la Cène. Cf. Rocholl, Die Realprâsenz, Gùtersloh, 1875.

Ces dernières indications montrent comment les discussions sur l’ubiquité du corps du Christ étaient fatalement destinées à s’orienter vers le problème de la kénose et finalement à s’y résorber. Voir Kénose, t. viii, col. 2339.

Au début du xviie siècle, Georges Altenrath attaqua violemment l’ubiquisme dans son Catechismus ubiquisticus oder der ubiquistische Glaube von der Person CIwisti und vom M, Nachtmahl (s. d.). Il cite les étranges assertions des théologiens ubiquistes, Jean Parsimonius, Luc Osiander, Simon Paulus de Rostock, Jean Brenz (fils du vieux Brenz) et surtout Jacques Andréa. Il ridiculise la « grossièreté » et 1’ « abomination » de leur doctrine qui « mêle le corps de Jésus-Christ à toute créature » et le met « non seulement dans le pain et le vin de la Cène, mais aussi dans les morceaux de bois, les pierres, dans l’air, le feu, l’eau ; dans les pommes, les poires, le fromage, la bière » (Parsimonius) ; qui fait du Christ « un nouveau Protée » (Simon Paulus) ; qui place le Christ « dans toutes sortes de cuvettes de bière, gobelets, cordes de pendus, etc. » Andréa. Op. cit., p. 9-17. On a vu plus haut comment Andréa se défendait. Après la première moitié du xviie siècle, l’ubiquisme avait disparu de la scène théologique.

On ajoutera à la bibliographie déjà donnée à Hypostatique (union), t. vii, col. 547 : A. Ehrard, Dos Dogma vom hl. Abendmahl und seine Geschichte, 2 vol., Francfort-surle-Mein, 1845 ; Kahnis, Die Lehre vom Abendmahl, Leipzig, 1851 ; H. Heppe, Geschichte des deutschen Protestantismus im XVI. Jahrhundert, 3 vol., Gotha, 1857 ; Dieckhofî, Die evang. Abendsmahlslehre in der Reformationszeit, Gœttingue, 1854 ; H. Schmid, Der Kampf der luth. Kirche um Lulhers Lehre vom Abendmahl, Leipzig, 1868 ; Werner, Geschichte der apologetischen und polemischen Literatur der christlichen Théologie, Schafîouse, 1861-1867, t. iv, p. 621 sq., et surtout Walch, Historisch und theologisch Einleitung in die Religionsstreitigkeiten der evangelisch-lutherischen Kirche, Iéna, 1733-1739, part. IV, p. 63 sq., qui contient la liste des ouvrages publiés depuis 1585 sur la dispute des théolo giens du Wurtemberg avec ceux d’Helmstœdt… touchant l’ubiquité du Christ.

Adversaires protestants de l’ubiquisme. — Zwingle et Calvin, dans les ouvrages cités au cours de l’article ; Théodore de Bèze, De corporis Christi omniprsesentia, Genève, 1578 ; Bullinger, De duabus naturis Christi, Zurich, 1564 ; Pierre Martyr, Dialogus de loco corporis Christi. Loci communes, Heidelberg, 1603 ; Georges Altenrath, Catechismus ubiquisticus.

Controversistes catholiques. — Grég. de Valencia, Contra fundamenta duarum sectarum, ubiquetarise et sacramentariee, Ingolstadt, 1582, et Comment, in Sum. theol. S. Thomee, III », t. I, q. ii, part. III ; Busæus (Buys), Disputatio de persona Christi adversus ubiquetarios, Mayence, 1585 ; Bellarmin, Controv., de Christo, 1. III ; Becan, Manuale controversiarum hujus temporis, t. II, c. i, dans Opéra omnia, Mayence, 1649, t. n ; Th. Raynaud, Christus Deus homo, t. II, sect. iv, c. ii, dans Opéra omnia, Lyon, 1665, t. i, p. 147 sq. ; Suarez, De incarnatione (comment, sur la Somme théol.), disp. XXXII, sect. iv.

A. Michel.

UGOLINI ou HUGOLIN, Barthélémy, savant canoniste, né en Toscane vers 1540, mort en 1610. Ses écrits les plus dignes d’intérêt sont : De censuris ecclesiastias, Bologne, 1594, Venise, 1602, in-4° ; De censuris reservatis summo pontifici in bulla Cœna Domini, Venise, 1609, in-fol. ; De simonia, Venise, 1609 ; De irregularitatibus, Venise, 1601, in-fol. ; Tractatus de officio et potestate episcopi, Rome, 1617, in-fol.

Hurter, Nomenclator, 3e éd., t. iii, col. 598-599.

J. Mercier.

ULFILA, apôtre des Goths danubiens au IVe siècle (311 ? —383 ?).
I. Sources.
II. Vie et écrits.
III. Doctrine.

I. Sources.

Les renseignements les plus importants que nous possédions sur Ulfila sont ceux qu’apporte une lettre d’Auxence de Durostorum jointe par l’évêque arien Maximin à sa Dissertatio contra Ambrosium. Cette lettre n’est malheureusement pas conservée telle qu’elle a d’abord été composée. Son auteur, Auxence, se présente comme un disciple d’Ulfila, il déclare que, dès son premier âge, il a suivi ses leçons et qu’il a appris les saintes Lettres auprès de lui. Comme nous n’avons pas de raison pour suspecter ces affirmations, nous pourrions attacher le plus grand crédit à l’œuvre d’un contemporain, bien plus d’un témoin oculaire, si elle nous était parvenue dans son intégrité. Mais le texte en a été transmis dans de mauvaises conditions ; il nous est connu par un seul manuscrit, le Parisinus latinus S907, du V-vr 3 siècle, qui renferme les deux premiers livres du De fide de saint Ambroise et les Actes du concile d’Aquilée et dans les marges duquel il a été transcrit, comme la Dissertatio elle-même. Cette copie, parfois difficile à lire, renferme des fautes nombreuses et l’on est en droit d’y soupçonner des lacunes. Ce qui est plus grave, c’est que Maximin ne s’est pas fait faute, en ajoutant à sa Dissertatio la lettre d’Auxence, de corriger cette lettre et, semble-t-il, de la compléter d’une manière qui n’est pas toujours exacte. Cf. B. Capelle, La lettre d’Auxence sur Ulfila, dans Revue bénédictine, t. xxxiv, 1922, p. 224-233. Malgré tout, il faut recourir à ce document : on y trouve l’indication de la doctrine enseignée par Ulfila, le résumé de sa carrière, enfin la formule de la profession de foi que l’évêque goth, au moment de sa mort, laissa par testament à son peuple. Le texte, déjà connu par les travaux de Waitz, Ueber das Leben und die Lehre des Vlfilas, Hanovre, 1840, et de Bessel, Ueber das Leben des Ulftlas, Gœttingue, 1860, a été édité avec soin par F. Kaufîmann, Aus der Schule des Ulfila, Strasbourg, 1899. Cf. ici t. x, col. 467-468.

En dehors de la lettre d’Auxence, nous pouvons trouver sur Ulfila des indications précieuses dans les Histoires ecclésiastiques de Philostorge, ii, 5 ; de