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    1. TRINITÉ##


TRINITÉ. SYNTHÈSE, LES PERSONNES

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faut abandonner le concept de certains anciens théologiens et même de saint Thomas dans sa jeunesse (In 7um Sent., dist. XXVIII, q. ii, a. 2) accordant au mot « verbe » une signification essentielle, que saint Thomas, dans la Somme, a définitivement répudiée. La connaissance commune aux trois personnes ne se termine pas, en effet, au Verbe ; c’est la connaissance du Père qui, véritable diction, produit le Verbe personnel. Cf. Ruiz, disp. LX, sect. VI. Ce qui n’empêche pas les théologiens de dire que Dieu voit toutes les créatures, ou que les élus, par la vision intuitive, les connaissent dans le Verbe, Verbe étant pris ici pour l’essence divine. Cf. Vasquez, disp. II, c. ii-m ; Platel, De Deo, n. 78 ; Piccirclli, De Deo uno et trino, n. 495 ; Pesch, n. 522 ; Billot, th. xxii. Ainsi, avec saint Thomas, a. 3, il est juste de dire que le Verbe est la cause exemplaire de toutes choses, en raison de l’essence absolue qui lui est commune avec le Père et le Saint-Esprit. Cette causalité exemplaire est une appropriation, tout comme au Père est attribuée la causalité efficiente et au Saint-Esprit la causalité finale. Sur les appropriations dans la Trinité, voir, outre l’art. Appropriations, t. i, col. 1171-1177, Ruiz, disp. LXII, c. iv et vu ; Salmanticenses, q. xxxix, a. 8 (simple note) ; Franzelin, th. xiii ; Scheeben, § 124 ; Hurter, n. 222 ; Kleutgen, n. 1106 ; Pesch, n. 639 ; Galtier, n. 381 ; d’Alès. p. 228233 ; Van der Meersch, n. 856 ; Diekamp-Hoffmann, p. 387 ; Billot, th. xxxiv. Au sujet de l’appropriation au Verbe de la création, ce dernier auteur fait remarquer que cette doctrine est corroborée par la ponctuation de Joa., i, 3-4 : sine ipso jactum est nihil. Quod factum est in ipso vita erat., ponctuation peut-être plus traditionnelle que celle de la Vulgate. Th. xxii, ad 2 U1B, note. Voir art. Verbe.

c) Puisque la procession du Fils est dans l’ordre du « connaître » divin, les théologiens se sont demandé quel est l’objet de cette connaissance, lorsque le Père, de toute éternité, produit le Fils (q. xxxiv, a. 3). La réponse obvie semble bien être que le Verbe procède selon la connaissance que Dieu a nécessairement de toutes choses, c’est-à-dire de la connaissance de l’essence divine et de ses attributs, des personnes divines, et de tous les possibles et, de plus — mais cela d’une manière simplement conséquente au décret libre de Dieu touchant la création — de la connaissance des choses créées. Cf. Dickamp, § 18, n. 2. Les théologiens ont voulu cependant apporter quelques précisions à cette doctrine générale, précisions auxquelles lis Salmanticenses consacrent toute la disp. XII, n. 1-131. Si l’on veut résumer brièvement les opinions, on s’en tiendra au schéma suivant : a. Tous, sans exception, admettent que le Verbe procède de la connaissance de l’essence divine et des attributs. Mais s’en tiennent là Scot et les scotistes. In /" Sent., dist. XXXII, q. i ; In II am Sent., dist. I, q. i, a. 2 : Verbum procederee cognitione ipsius essentiæ divinee tantum et non ecognitione divinarum personarum. Frassen s’efforce cependant de montrer que Scot est d’accord avec les thomistes, Scotus academicus, tract. III, disp. I, a. 3, q. ii, concl. 2. — b. Vasquez, à la connaissance de l’essence, ajoute celle du Père et du P’ils, mais non celle du Saint-Baprft et dis créatures possibles ou réelles. Disp. CXI. II et CXLIII. — c. Le même Vasquez, disp. (XI. III, n. 33 et Arrubal, disp. CCXII, c. v, affirment que la procession du Verbe n’implique pas, en soi, la connaissance des choses possibles, Dieu connaissant sa toute-puissance, non par rapport à son objet, mais par rapport à la perfection même qu’elle implique.

— d. Enfin, la plupart des thomistes ne conçoivent pas que la procession du Verbe implique, par elle-même, la connaissance des créatures : les créatures ont été librement voulues par Dieu et réalisées dans le temps. Cependant, on peut admettre que cette connaissance est concomitante ou conséquente au décret éternel relatif à la création. Salmanticenses, loc. cit., n. 128131 ; cf. Gonet, disp. IX, a. 3, § 1 ; Billuart, dissert. V, a. 3 ; Hugon, Tractatus dogmatici, t. i, q. vii, n. 4. Suarez, qui suit ici les thomistes, n’accepte la connaissance des choses créées qu’au titre de « fondement matériel » et non au titre d’ « objet matériel » de la science de vision, t. IX, r. vu. Molina et Vasquez sont sur ce point d’accord avec Suarez. Aussi d’autres thomistes disent-ils simplement que la procession du Verbe implique également la connaissance des créatures. Billot, th. xxiii ; Janssens, p. 508 ; van der Meersch, n. 772-773 ; Galtier, n. 336-337. Saint Thomas n’écrit-il pas expressément : Pater, intelligendo se, et Filium, et Spiritum Sanctum, et omnia alia, quæ ejus scienlia continentur, concipit Verbum, q. xxxiv, a. 1, ad 3um ? Sur tous ces points, voir outre les Salmanticenses. loc. cit., Sua-ez qui, au t. IX, donne un bon aperçu d’ensemble des controverses et L. Janssens, De Deo trino, p. 496 sq. Pour les sources patristiques, voir Ruiz, disp. LX, sect. iv-v ; LXII, sect. n ; LXIII, sect. ni.

d) L’image est un terme personnel, propre au Fils (q. xxxv, a. 1-2). Cf. Salmanticenses, disp. XIII. Les théologiens précisent ici deux points : a. La notion d’image est appliquée au Fils par Col., i, 15 ; cf. Hebr., i, 3 ; et par bien des Pères, voir Petau, loc. cit., c. v et vi. Elle convient proprement à la divinité, c’est-à-dire au Fils. Voir ici Fils de Dieu, col. 2474-2475, nonobstant l’opinion contraire, aujourd’hui abandonnée, de Durand de Saint-Pourçain, In J um Sent., dist. XXVIII, q. iii, n. 5, que réfutent les Salmanticenses, loc. cit., dub. i, § ii. — b. Mais la notion d’image a été aussi appliquée au Saint-Esprit, surtout par les Pères grecs. On cite surtout Grégoire le Thaumaturge, Expositio fidei, P. G., t. x, col. 985 A ; S. Athanase, Ad Serapionem, i, n. 20-24, t. xxvi, col. 577, 588 B ; S. Cyrille d’Alexandrie, Thésaurus, assert. 33, t. lxxv, col. 572 AB ; S. Basile, De Spiritu sancto, n. 23 et 47, t. xxxii, col. 109 B, 153 A ; S. Jean Damascène, De fide orth., t. I, c. xiii, t. xerv, col. 856 AB. Cf. Petau, t. VII, c. vu ; de Régnon, t. iii, p. 320 sq. ; d’Alès, p. 143, 145-146. Par sa procession, en effet, le Saint-Esprit est semblable au Père et au Fils. Telle est l’explication donnée de cette formule par saint Thomas, Cont. errores Grsecorum, c. x. On trouve quelque écho de cette doctrine chez Capréolus, In I" m Sent., dist. XXVI, q. ii, concl. 6° ; et chez P. Auriol, voir ci-dessus, col. 1 750. Nos théologiens font observer que le terme d’image ne peut être appliqué au Saint-Esprit que d’une manière impropre : au sens strict l’image n’est telle que lorsque la ressemblance avec l’original lui vient en vertu de son origine même ; ce qui est le cas pour le Fils, engendré du Père en une nature semblable, et non pour l’Esprit Saint, chez qui la ressemblance est réalisée pour ainsi dire per accidens relativement à la spiration. Cf. Salmanticenses, disp. XIII, dub. n ; Ruiz, disp. LXIV, sect. vi ; Pesch, n. 588.

3. Le Saint-Esprit (q. xxxvi-xxxviii). —

a) Le nom du Saint-Esprit, donné dès le début du christianisme à la troisième personne, indique bien la procession selon la volonté : Le substantif Spiritus implique, dans les choses matérielles, l’idée d’impulsion, de mouvement… Or, le propre de l’amour est de pousser et d’entraîner la volonté vers l’objet aimé. Quant au mot « saint », il s’applique à tout ce qui a Dieu pour but et la troisième personne procède par mode d’amour. Le nom d’Esprit-Saint lui convient parfaitement. S. Thomas, a. 1. C’est cette vérité qu’expriment unanimement l’Écriture, les Pères, les théologiens. Voir de Régnon, op. cit., t. iv, p. 287-384.

Deux autres noms ont été choisis pour désigner