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WIRCEBl.’RGENSES


genses, l’axe des controverses s’est déplacé. Les auteurs de la théologie de Wurzbourg font preuve d’une science avertie, encore qu’assez impersonnelle. Leurs positions scolastiques ont peu de relief, et l’on se trouve dans une autre ambiance que chez leur contemporain Billuart, que l’on trouve ici ou là critiqué pour des assertions historiques peu défendables.

Ce manuel répondait cependant aux besoins d’une époque, aussi fut-il très bien accueilli. En 1841, Migne regrettait qu’il fût tombé dans l’oubli, et pensait qu’il n’avait pas son égal. Il réimprima pour son compte le De fide de Kilber, dans le Theologise cursus completus, t. vi, 1841, col. 433 sq. Scheeben considère la Théologie de Wurzbourg comme l’ouvrage le plus important publié par les jésuites à l’époque des « épigones « (c’est-à-dire de 1660 à 1770). Il unit heureusement, nous dit-il, la spéculation et l’histoire et clôt dignement une période de l’histoire de la théologie allemande. Handbuch der kalholischen Dogmatik, t. i, 1873, p. 455. Le P. Chr. Pesch parle dans le même sens, Prselectiones theologise dogmaticæ, 2e éd., t. i, 1898, p. 27, et les historiens de la théologie lui font une place digne de son mérite, ainsi K. Werner, Hurter, M. Grabmann (voir la bibliographie).

La théologie de Wurzbourg a été rééditée en 1852 chez Julien et Lanier à Paris, 5 tomes en 10 volumes. L’éditeur avoue avoir fait quelques modifications dans la présentation, surtout dans l’ordre des traités. Cependant le texte est respecté et il est remarquable que, sur un seul point ou à peu près, les positions adoptées aient été rejetées ensuite par l’Église (voir infra à propos de Holtzclau). Une autre édition a été publiée en 1879-1880 chez Berche et’Tralin, en 10 volumes. Elle reproduit celle de 1852, se contentant de compléter la série des papes ou des conciles (t. i, p. 229, 390), d’ajouter le Syllabus aux documents du magistère (t. i, p. 522), et d’insérer le texte du concile du Vatican dans la démonstration de l’infaillibilité du pape (t. I, p. 345). Nous citerons cette dernière édition, en indiquant le tome et la page.

Avant d’examiner la contribution particulière de chaque auteur, donnons le plan de l’ouvrage tel qu’il est dans les éditions du xix c siècle. Il s’ouvre par une espèce de théologie fondamentale, dont la première partie reproduit les Principia theologise ad usum candidatorum theologise publiés par Kilber en 1762 et qui, dans l’édition primitive, formaient une introduction séparée à la Theoiogia dogmatico-polemico-scolastica. Ces Principia comportent un De Scriptura et Traditione, auquel sont annexés les traités de l’Église, des conciles et du souverain pontife. On y ajoute un certain nombre de thèses sur l’autorité des Pères, des théologiens, et sur l’usage de la raison et de l’histoire en théologie. La seconde partie de cette introduction méthodologique est un traité De religione composé par Neubauer et sur lequel nous reviendrons. La dogmatique spéciale enchaîne de façon classique les traités De Deo uno et trino, De angelis, De Dco creatore (Kilber), De incarnations Yerbi divini (Holtzclau), De beaittudine, De actibus humanis, De legibus (Neubauer). Le De jure et justilia (Holtzclau) est suivi d’un De religione que les éditeurs de 1852 ont tiré des nii res de l.essius. Puis vien n ci il les traités De percuta. Dr gratta, De fuslifteatione, De merlto (Kilber), De viriutibw theologieit (Kilber) avec an appendice sur les vertus cardinale ! tiré encore « les œuvres de Lessius.

Enfin viennent les traités sur les sacrements : De

§acramenti » in génère, Dr baptismo et conflrmattone, De eucharlttla (Holtzclau), De ptenttentta (Munier), Dr oriimr et malrimonio (Holtzclau). La répartition’les matières entre les ailleurs est. on le voit, assez inégale. Il n’y a pas de traite des fins dernières, mais il est un peu question du ciel, de I enfer et du purga toire à propos de la béatitude ou du péché. La mariologie est également absente. Kilber traite de la justice originelle dans son De gratia, et non dans son traité du péché originel. Les généralités sur le surnaturel sont mises en tête du De virtutibus. Dans l’ensemble, cette disposition est celle de nombreux manuels publiés au cours du xixe siècle.

Des quatre auteurs de la Theoiogia Wirceburgensis, le plus important est sans contredit Kilber (17101783). Henri Kilber enseigna la théologie à Wurzbourg à partir de 1751, après avoir été professeur de philosophie à Heidelberg. En 1764, le prince-évêque créa pour lui une chaire d’Écriture sainte. Duhr. op. cit., p. 65. Mais sept ans après, Kilber quittait l’enseignement pour devenir socius du provincial des jésuites à Heidelberg. La Compagnie ayant été supprimée en 1773, il devint régent du séminaire Saint-Charles dans la même ville. Un contemporain, parlant des professeurs de Wurzbourg, le présente comme un homme de grande culture, ayant l’esprit de synthèse, et habile dialecticien. Duhr, op. cit., p. 67. Ces qualités philosophiques apparaissent dans son traité De Deo uno, qui reprend un cours édité en 1752. On les retrouve dans les discussions sur la grâce. Cependant, comme ses collègues. Kilber semble porter plus d’intérêt encore aux questions positives. Professeur d’Écriture sainte, il a laissé une Analysis Biblica, Heidelberg, 1773, qui a été plusieurs fois rééditée, et un ouvrage sur la vie du Christ : Novi Testamenti pars prima seu historien complectens historiam dominicain concordia evangeliorum concinnatam…, Wurzbourg, 1765. Cet intérêt porté à l’Écriture sainte apparaît dans la première partie de ses Principia theologise. Son De Scriptura porte la marque des préoccupations de l’Église après la grande crise du xvr 3 siècle ; on y prouve, à grands renforts de textes scripturaires et patristiques, que la lecture de l’Écriture sainte n’est pas indispensable au salut et qu’elle ne doit pas être permise sans discernement. T. i, p. 54. Ailleurs, Kilber démontre que le fameux verset des trois témoins célestes, I Joa., v, 7, est certainement authentique. T. iii, p. 374. Cette introduction méthodologique avait cependant de grandes qualités ; elle incorporait à la théologie les travaux des grands controversistes et continuait des devanciers comme Pichlcr. La dogmatique de Kilber est inégale. Le De Trinitate semble plus faible que les traités sur le péché, la grâce et les vertus qui avaient fait l’objet de publications antérieures (voir Sommervogel, t. iv, col. 1040, et Rivière, n. 15 18). Le De gratia comporte une longue introduction sur le pélagianisme et le semi-pélagianisme, le protestantisme, le baianisme et le jansénisme. T. iii, p. 168 257. Rien de tel au traité de la Trinité, où l’on se contente de répondre à des difficultés comme celle de la « chute » du pape Libère. T. in. p. 311-321. En général, la science de Kilber est grande, mais ne semble pas très personnelle. II accepte la thèse aventureuse de Sirmond sur l’existence d’une secte prédestina tienne à la fin de l’âge patristique, t. iii, p. 270, invoque le patronage de saint Augustin, avec discré lion, il est vrai, en faveur de la prédestination />o.s7 prœvisa mérita. T. ni, p. 249. Mais il a le mérite de défendre la croyance à l’immaculée conception, I. vil, p. III, d’insister contre le jansénisme sur la volonté salvi tique universelle, tant à propos du salut des infidèles, t. vu. p. 364, qu’à propos des enfants morts sans baptême, t. III, p. 199. H est moins heureux en

acceptant les thèses de Salmeron sur la nature du péché originel. T. iii, p. 100. Dans les querelles de

aUXllii », il est évidemment rallié à la théorie de la science moyenne, t. iii, p. 159, et défend une espèce

de congrulsme qui est plus apparenté aux thèses de

l.essius qu’à celles de l’.ellarmin ou île Suarei. I-vu.