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ORDRE. LE RITE PRIMITIF


depuis le lectorat jusqu'à l'épiscopat. Jaffé. Régenta n. 255 ; cf. Cavallera, Thésaurus, n. 1310.

On consultera tout d’abord la bibliographie des articles Diacres, t. iv, col. 731 ; Évêques, t. v, col. 1700-1701 ; Acolyte, t. r, col. 316 ; Exorciste, t. v, col. 1786 ; Lecteur, t. ix, col. 117 ; on se reportera également aux articles Église et Évêques du Dictionnaire apologétique de la Foi catholique de A. d’Alès, t. i, col. 1248-1268, et 1750-1786 ; ainsi qu'à plusieurs articles du Dictionnaire d’archéologie et de liturgie : Acolyte, t. i, col. 348 ; Diacre, t. iv, col. 738 ; Épiscopat, t. v, col. 202, avec sa copieuse bibliographie, col. 237-238 ; Exorcisme, exorc isfe.ibid., col. 964 ; Fossoyeurs, t. v, col. 2065 ; Lecteur, t. VIII, col. 2241.

Ajouter : F. Prat, La théologie de saint Paul, 7e édit. 1923, t. ii, p. 362 sq. ; H. Lietzmann, Zur altchristlichen Verfassungsgeschichte, dans Zeilschrift [iir wissensch. Théologie, 1913, t. lv, p. 97-153 ; Tixeront, L’ordre et les ordinations, Paris, 1925 ; H. DiecUmann, De Ecclesia, t. i, n. 410 sq. ; M. d’Herbigny, Theologica de Ecclesia, thèse xxxiv.


III. Le rite sacré de l’ordination. —

Jusqu’ici nous n’avons encore fait que constater, dans l'Église, le fait d’une hiérarchie sacrée, distincte du corps des simples fidèles, et dont les membres, à des degrés divers, ont pour fonction de gouverner le peuple chrétien et d’administrer les rites sacrés. Nous avons aussi constaté le souci constant des interprètes de l’enseignement de l'Église, de rattacher les divers degrés de cette hiérarchie, et notamment les trois degrés supérieurs, épiscopat, presbytérat, diaconat, à une institution divine par l’origine apostol.que.

Il nous faut maintenant préciser par quel rite sacramentel, au cours d£s siècles, furent ainsi transmis les pouvoirs attachés à l’ordre, autrement dit, quel fut le rite sacré de l’ordination. Question complexe, si l’on considère, d’une part, la multiplicité des degrés dans la hiérarchie sacrée, d’autre part, les modifications importantes subies par le rite au cours de l’histoire. Cette complexité même soulèvera de sérieuses difficultés à la systématisation théologique du sacrement de l’ordre. Dans ce paragraphe, nous nous bornerons aux faits.

I. LE RITE PRIMITIF : L’IMPOSITION LES MAINS.

— Sur l’imposition des mains, l’origine et les usages du rite, voir t. vii, col. 1302-1341.

1° Les antécédents juifs du rite d’ordination et leur influence sur le rite chrétien. — Si l’on s’en tient aux données purement scripturaires, il n’apparaît pas que Jésus ait institué lui-même immédiatement le rite chrétien de l’ordination. L’imposition des mains, qui constitue, avec les prières qui l’accompagnent, le rite chrétien primitif, est d’origine apostolique. Il semble certain néanmoins que les apôtres, vraisemblablement instruits par le Christ ou inspirés par l’Esprit-Saint, ont cherché dans le rite juif de l’ordination les éléments du rite chrétien. Voir sur l’influence juive dans le rite d’ordination, J. Morin, Commentarius de sacris Ecclesise ordinationibus, part. III, p. 141 sq. Cette assertion paraît d’autant plus acceptable, que les autorités juives abandonnèrent la semikah, comme elles avaient supprimé le baptême des prosélytes, s’apercevant, sur ces deux points, du « larcin » des chrétiens.

Dans le Deutéronome, xxxiv, 9, et les Nombres, xxvii, 12-23, Josué apparaît rempli de l’Esprit de Sagesse parce que Moïse lui a imposé les mains. Nous n’avons pas à étudier ici le rapport des deux récits. D’après les plus anciennes traditions, l’imposition des mains est un rite d’installation ; en même temps que l’investiture de la fonction, elle confère un don de l’Esprit ; cf. Behm, Die Handauflegung, p. 122-142 ; J.-Z. Lauterbach, Ordination dans Jewish Encyclopedia. t. ix, 1905, p. 428-430 ; M. Gaster. Ordination, dans Encyclopedia oj religions and ethics,

Edimbourg, t. ix, 1917, p. 552-554. Le rite deutéronomique ne devint un rite d’ordination régulièrement établi qu’après la restauration juive. Cf. Schurer, Geschichle des jùdischen Volkes, t. ii, p. 250 sq. Son importance fut définitivement acquise lorsqu’elle fut exigée dans l’installation des juges et des docteurs. Sur ces points d’histoire, les livres de l’Ancien Testament ne nous ont laissé que peu ou point de renseignements ; voir cependant sur l’ordination des lévites, Num., vrft, 5-26. Les détails fournis par le Talmud sont accompagnés d’un tissu de légendes ; cf. J. Coppens, L’imposition des mains, p. 164, avec références aux études spéciales sur ce point, et ici, l’art. Imposition des mains, t. vii, col. 1304.

Quelle que soit la date exacte à laquelle la semikah fut adoptée, il est certain qu’au début du IIe siècle de l'ère chrétienne, les conseils de justice et à leur tête le sanhédrin recrutaient leurs membres moyennant cette cérémonie. C’est peu après qu’elle disparut. Dans l’art. Ordination de Lauterbach, p. 429, on trouvera des détails intéressants sur la suppression de la semikah sous Hadrien, après l’insurrection de Bar-Kokéba. La suppression de toute ordination n’aurait eu lieu qu’en l’an 361, en raison de la fin de toute autorité directrice en Israël.

Dans l’ordination juive, l’imposition des mains ne tenait d’ailleurs qu’une place fort restreinte ; elle n’est attestée formellement que pour les années qui précédèrent la révolte de Bar-Kokéba ; mais incontestablement ce rite remonte plus haut et doit avoir été contemporain du ministère de Jésus, des apôtres et des premiers missionnaires chrétiens. Dans sa conception primitive, cette imposition des mains juive comportait non seulement la transmission du ministère, mais encore la transmission de l’Esprit ; cf. Volz, Der Geist Gotles, Tubingue, 1910, p. 115, 139, et surtout H. L. Stracket P. Billerbeck, Kummentar zum Neuen Testament aus Talmud und Midrasch, t. u : Das Evangelium nach Markus, Lukas und Johannes und die Apostelgeschichte, Munich, 1924, p. 648. « Cette interprétation s’appuie sur le passage deutéronomique, xxxix, 9…, puis sur les croyances juives populaires exprimées dans l’Ascension d’Isaïe, vi, 4, sur les récits talmudiques des ordinations manquées de Hanina et de Hosaja par Rabbi Johanan, Talm. Babyl., Sanhédrin, 14a, édit. Goldschmidt, t. vii, p. 45 ; enfin sur les commentaires rabbiniques de l’ordination de Josué, Midras, Bemidbar Rabba, édit. Wuensche, 1885, p. 516, et Raschi, dans son commentaire sur les Nombres, xxvii, 18, 20. Voir Behm, op. cit., p. 140, n. 3. » J. Coppens, op. cit., p. 169.

U n’y a donc rien d'étonnant que les apôtres aient introduit ce rite dont la signification primitive répondait si bien à l’emploi qu’ils en devaient faire dans l’ordination chrétienne. Toutefois, il faut se garder d’expliquer le choix des apôtres uniquement par l’influence des traditions rabbiniques Les premières communautés chrétiennes prirent de bonne heure conscience de ne rien enseigner en dehors de la doctrine du Christ. Saint Paul lui-même représente son ministère comme le ministère du Seigneur Jésus, I Cor., surtout c. u ; et saint Matthieu rappelle que les apôtres ont dû apprendre aux nations à observer tout ce que le Christ avait ordonné, xxviii, 19-20. Si le rite de l’imposition des mains n’avait eu d’autre recommandation que la tradition rabbinique, il ne se serait jamais introduit dans les Églises du christianisme. Il est donc vraisemblable, sinon certain, que Jésus l’avait indiqué lui-même aux apôtres. Tout au moins faut-il dire que cette indication résulte d’une inspiration de l’Esprit-Saint.