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PACIEN


turaires du pouvoir que possède l’Eglise de remettre le péché. A coup sur elle ne le fait pas en son nom personnel, mais par une délégation divine (voir surtout la discussion relative au pouvoir des clefs, n. Il et 12). En se montrant accueillante au pécheur repentant, elle reste parfaitement dans l’esprit de l'Évangile. n. 13 et 14 ; et quant à ce que dit celui-ci sur le péché irrémissible (le blasphème contre l’Esprit) l’objection qu’en tirent les novatiens se résout sans trop de peine, n. 15. Bien plus facilement encore se débarasse-t-on de tant de paroles et d’exemples empruntés aux deux Testaments et dont le novatianisme voudrait faire peur aux catholiques, n. 10-19. Et pour ce qui est des arguments qu’il croit devoir trouver dans certains traités de Cyprien (le De lapsis est expressément signalé), il n’est que d’y regarder de près pour voir que ces arguments se retournent contre les rigoristes, n. 23, 24. Le tout se termine par une chaleureuse invitation conviant les schismatiques à rentrer dans l’unité de l'Église. L'évêque promet d’ailleurs, ayant ainsi répondu aux difficultés des novatiens, de proposer de manière positive la doctrine catholique : subjungam, cutn vacuum crit, et aliam epistolam, in qua non veslra redarguam sed nostra proponam.

Cette lettre, si elle a été écrite, ne s’est pas conservée et c’est bien regrettable ; la manière si heureuse dont Pacien avait discuté les idées novatiennes faisait bien augurer de ce qu’aurait été une exposition positive de ce point si important. A défaut de ce traité d’ordre théorique, il nous est resté du moins une exhortation (parœnesis), relative à la pénitence, adressée, non plus aux gens du dehors, mais aux fidèles et qui a l’avantage de nous montrer comment, dans la pratique, les choses se passaient. Nul traité ancien ne jette un jour plus vif sur les divers aspects de la pénitence ecclésiastique. Texte dans P. L., loc. cit., col. 1081-1090. Adressée sans doute de vive voix à l’assemblée chrétienne, cette parénèse a été ensuite mise par écrit : elle imite d’assez près le De psenitentia de Tertullien. Comme ce dernier traité, elle, vise tant les catéchumènes, pour leur inspirer la crainte des rigueurs pénitentielles, que les fidèles, pour qu’ils en usent, si ce remède leur est devenu nécessaire. Avec beaucoup de sens de la composition, l'évêque étudie d’abord les fautes qui sont astreintes à la discipline pénitentielle alors en usage ; il exhorte ensuite ceux qui auraient commis un ou plusieurs de ces peccota mortalia à se soumettre à cette discipline et tout d’abord à l’aveu qui doit les classer dans la catégorie des pénitents. Mais, parmi ces derniers, il ne manque pas de gens qui, ayant fait leur confession, refusent ou négligent de se soumettre ultérieurement à toutes les rigueurs de la satisfaction ; de l’exomologèse ils négligent ainsi la partie capitale. C’est à décrire les conséquences funestes de ces deux manières d’agir que l’auteur consacre ses derniers développements, en même temps qu’il vante les heureuses suites de la pénitence pleinement et joyeusement accomplie. La simple énumération de ces divers points suffit pour faire saisir tout l’intérêt qui s’attache à une étude approfondie de ce court traité.

Du même genre est un sermo de baptismo, ibid., col. 1089-1091, dont la division, annoncée au début, comme celle de la parœnesis, n’est pas aussi religieusement respectée : aperiam quid fuerit ante gentilitas, quid fldes priestel, quid baptismus indulgent. La doctrine du péché d’origine et de sa transmission à la descendance d’Adam s’y exprime avec une clarté que l’on ne trouve guère ailleurs avant saint Augustin. C’est à cette corruption foncière de l’humanité engendrée par la première désobéissance que porte remède la souveraine obéissance du Christ. Sa victoire sur toutes les tentations qui l’engageaient à ne pas se sou mettre à Lieu eut des fruits de salut non seulement pour lui-même, qui échappa à l’emprise de la mort, mais pour tout le genre humain, dont il partageait la nature. Justifia Christi necesse est ut in genus transeat. C’est la foi d’abord, le baptême ensuite, indispensable complément de celle-ci, qui nous fait participer à cette victoire du Christ. Foi et ablution s’unissent pour nous faire naître à cette nouvelle vie que le Sauveur est venu apporter, pour nous faire vivre en une punie et une sainteté inconnues en dehors de l'Église. Dans sa sobriété, cette courte instruction présente un remarquable raccourci de la catéchèse prébaptismale.

A ces élégants opuscules il en faut ajouter, semble t-il, un autre qui vient d'être récemment découvert. Dom G. Morin a étudié et publié, en 1913, un traite ayant sensiblement la longueur de la 3e lettre à Sympronien et qui a toutes chances de représenter une œuvre de Pacien. Cet écrit, intitulé De simititudine carnis peccati, a été cité sous le nom de saint Jérôme lors de la controverse adoplianiste du ix c siècle par Élipand de Tolède, P. L., t. xevi, col. 872 CD (Bealus Hieromjmus iterum dicit), et par Félix d’Urgel (au témoignage d’Agobard), t. civ, col. 59 D. 00 B, 65B-66B ; les deux patrons de l’adoptianisme cherchaient à abriter leur erreur sous quelques expressions de ce traité. La dernière citation, qui est assez longue, a permis à dom G. Morin de retrouver cet opuscule dans une pièce inédite du Paris, lat. 13 3 11. Publié dans Études, textes, découvertes, t. i, p. 107150. Dans ce ms. il figure sous le nom du bienheureux Jean. Les preuves qu’a données l’inventeur de l’appartenance à Pacien de ce traité, preuves tirées surtout de l’examen interne du livre et de la comparaison avec les ouvrages de l'évêque de Barcelone, ont rallié les suffrages des critiques. Il serait facile, nous senible-t-il, de les renforcer encore.

Quoi qu’il en soit, l’ouvrage se présente comme adressé à une vierge riche et fort généreuse, dont l'éloge encadre un long développement théologique. La destinataire a failli succomber à une épidémie qui a fait de grands ravages dans le pays. Cette calamité a-t-elle donné lieu aux manichéens à faire quelque propagande en faveur de leur solution du problème du mal. C’est possible. Toujours est-il que l’auteur du traité s’en prend vivement à eux et tout spécialement à ce point de leur doctrine qui niait la réalité de la nature humaine de Jésus. C’est à démontrer que le Christ (c’est le nom que l’auteur emploie pour désigner le Fils) a vraiment assumé notre chair, et la « chair de péché », celle qui, de par la malédiction d’Adam, est exposée aux souffrances et à la mort, que le traité est consacré. Très vigoureux quand il s’agit de mettre en évidence la réalité de la nature humaine du Sauveur, très perspicace en ses analyses des opérations de l’humanité, l’auteur est encore très inhabile à exprimer les rapports entre les deux éléments, divin et humain, qu’il reconnaît en l’Homme-Dieu. Cela tient partiellement à l’absence d’une terminologie arrêtée ; l’emploi de l’expression concrète, homo perfectus, là où nous mettrions l’abstrait, natura humana, est aussi pour beaucoup dans l’impression troublante que causent certains passages. Celui qui a été cité par les adoptianistes espagnols, si on le prenait en toute rigueur, ne serait pas loin d’exprimer l’idée qui a été condamnée sous le nom de « doctrine des deux (ils >. Parlant du baptême de Jésus et de la voix qui se fait entendre : « Tu es mon fils, je t’ai engendré aujourd’hui » (c’est une des leçons de Luc, iii, 22), l’auteur oppose en ces termes le Dieu et l’homme : « Quis est iste cœlestis ? llle sine dubio qui eum quem gestabat in baptismale fecit audirc quod unie illum nullus audierat : « Filins meus es tu ego hodie genui te. » Et qualiler dicitur « hodie » si « in principio Verbum, et Verbum apud