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MESSE DANS LA LITURGIE, LA MESSE ROMAINE


tem accipiam, Domine non sum dignus, Corpus Domini, Quid retribuam, Sanguis Domini, qui sont des textes de l'Écriture, notamment des psaumes, arrangés pour la circonstance, et qui ont été peut-être des antiennes de communion. L’une d’elles, le Quod ore sumpsimus est une postcommunion du Sacramentaire léonien dont le style admirablement précis, trahit l’origine. Au contraire le Corpus luum, Domine, est d’origine et de style gallican.

Dans les premiers siècles les fidèles recevaient dans leurs mains le pain consacré et buvaient au même calice. Au temps de saint Grégoire la coutume subsistait encore de donner le pain consacré au communiant qui le prend dans ses mains pour le porter dans sa bouche. On suit dans les Ordines romani les variations que subit la réception de l’eucharistie. Aujourd’hui on récite le Conftleor suivi de l’Indulgentiam ou absolution du prêtre avec ï'Ecce Agnus Dei, et le Domine non sum dignus. L’Amen après avoir reçu la communion a été supprimé, sauf quand la communion est donnée par l'évêque. Ge petit rituel qui ne paraît pas antérieur au xiie siècle, et qui n’est qu’une répétition de prières déjà dites, a dû constituer d’abord, pense-t-on, le rituel de la communion distribué en dehors de la messe.

La coutume de communier sous une seule espèce ne s’est introduite que peu à peu en Occident et pour des raisons de convenance et de facilité pratique. Au temps de saint Thomas elle n’est pas générale encore, et celui-ci se demande si l’on peut communier sous une seule espèce. C’est à l'époque du mouvement hussite et au concile de Trente que cette discipline a été sanctionnée. Nous renvoyons pour cette question à l’article Communion sous les deux espèces, t. iii, col. 552 sq.

L’usage de chanter un psaume pendant la communion est parallèle à celui de l’introït et de l’oflertoire et à peu près du même temps. Saint Augustin y fait allusion. Le psaume se terminait par la doxologie d’après le premier Ordo romanus. La coutume subsiste, mais sous la forme d’une seule antienne, qui est tirée parfois d’un autre livre de l'Écriture.

L’antienne de communion est suivie d’une oraison qui, sous le nom de postcommunion (anciennement Oratio ad eomplendum) correspond à la collecte et à la secrète. La collection de tputes ces oraisons est essentiellement et, à peu près sans exception, romaine ; elles portent elles aussi le cachet du génie romain. On y trouve souvent, en termes éclatants, la preuve de la foi de cette Église en la transsubstantiation, ses conceptions sur le sacrifice de la messe et sur l’eucharistie en général. Bossuet s’y réfère souvent dans ses controverses avec les protestants.

Les messes de carême ont en plus une oraison super populum qui est une relique du passé. On a beaucoup discuté sur son origine et sa portée. On la trouve dans le Sacramentaire grégorien et même dans le léonien et dans le gélasien. On l’a assez naturellement rapprochée des bénédictions épiscopales que l’on rencontre dans la liturgie gallicane et dans d’autres liturgies. Il existe dans certains livres liturgiques des collections assez importantes de ces prières sous le titre de Bénédiclional. Les oraisons romaines super populum ont en effet l’allure d’une bénédiction du peuple fidèle.

Le congé est donné par la formule, lie, missa est. Ce terme de missa sur lequel discutent encore les philologues, est resté le nom le plus populaire de la messe dans plusieurs langues. Equivalent de missio ou dimissio, c'était le terme courant au v » et au vie siècle pour désigner la finale d’un office aussi bien que de la messe. Après cela le pontife se retirait en bénissant le peuple. Le Placeat et l'évangile de saint Jean étaient des pratiques de dévotion privées qui,

peu à peu, se sont généralisées et ont été rattachées à la messe, comme ce fut le cas pour d’autres pratiques qui font corps maintenant avec la messe.

Note sur les sacramentaires et missels romains et les ordines.

Dans la liturgie romaine comme dans les autres liturgies latines, le système a prévalu de changer certaines formules des prières de la messe, suivant les circonstances et les époques de l’année liturgique. Cet usage qui ne s’est jamais établi en Orient, et qui constitue pour les liturgies latines une caractéristique si accentuée, a donné naissance à la composition d’un certain nombre de livres liturgiques dont la connaissance est nécessaire pour l'étude de la messe dans la liturgie. Les principaux sacramentaires romains sont le léonien, le gélasien et le grégorien. Les Ordines romani décrivent les cérémonies de la messe romaine du viiie au xve siècle. Nous renvoyons pour les notions sur ces livres a l’article Liturgie où on les trouvera décrits. Le missel romain actuel ne représente exactement ni le léonien, ni le gélasien, ni même le grégorien, encore qu’il en contienne des éléments nombreux. Sa rédaction actuelle est une sorte de compromis entre les anciens livres romains et les gallicans, si bien qu’il faudrait l’appeler rigoureusement gallicano-romain, si l’on voulait tenir compte des matériaux qui le composent.

Son histoire a du reste été reconstituée après des recherches très longues et très méritoires de certains liturgistes, notamment celles d’Edmond Bishop dont les travaux sur ce point révêlent un sens critique et une perspicacité de premier ordre. Comme nous l’avons résumée à l’article Liturgie, nous nous contentons d’y renvoyer le lecteur.

Nous avons dit aussi, col. 814, 815, comment au cours des âges ce missel a subi des changements de divers genre, et comment les évêques réunis à Trente demandèrent au Saint-Siège de reviser ce missel en même temps que les autres livres liturgiques. Ce fut l'œuvre de saint Pie V et de ses successeurs Clément VIII et Urbain VIII dont on trouve les bulles en tête de nos missels.

On trouvera à l’article Canon de la messe une bibliographie abondante à laquelle nous renvoyons. Nous ne citerons ici que quelques travaux plus récents et, parmi les anciens, ceux qui méritent une mention. Nous laissons de côté les ouvrages où la messe est étudiée au point de vue mystique et théologique, même ceux qui, comme les ouvrages du P. de La Taille ou de M. Lepin, ont une portée liistorique, mais que l’on trouvera cités ailleurs. Parmi les modernes, le livre de Mgr Duchesne sur les Origines du culte chrétien (5e édition) mérite toujours d'être étudié avec le plus grand soin, même si quelquesunes de ses hypothèses paraissent discutables. Les Leçons sur la messe de Mgr Batiffol, Paris, 1919, et son ouvrage L’eucharistie (5e édit., 1913) résument heureusement les derniers travaux sur le sujet. Edmond Bishop dans ses Lilurgica historica, Oxford, 1918, et dans les articles que nous avons cités, a étudié à fond quelques questions essentielles pour l’histoire de la messe. Une de ses dissertations principales sur la messe romaine a été présentée aux lecteurs français dans une édition enrichie de notes précieuses par dom Wilmart, Le génie du rit romain, Paris, 1920. Dom Cagin dans ses divers travaux, Paléographie musicale, t. v, avant-propos ; Te Deum ou Illatio ? Paris, 1906 ; Eucluu-istia, Paris, 1912 ; L’anaphore apostolique et ses témoins, Paris, 1919, a fait sur la question de la messe des recherches fort savantes.

Les travaux de Probst, trop dédaigneusement ignorés en France et dont il faut bien reconnaître l’Insuffisance sur quelques points, ont réuni de très nombreux textes sur la messe, et ses livres restent utiles ; notons en particulier sur notre sujet, Liturgie des IV. Jalirhunderts und deren Reform, Munster, 1893, et Die àltesten rômischen Sacramentarien und Ordines, ibid., 1892 ; A. Franz, Die Messe im deulschen Miltelaller, Fribourg-en-B., 1902 ; Thibaut, La messe romaine, Paris ; sous ce titre Liber sacramentorum, dom J. Schuster a publié en italien huit volumes de notes historiques et liturgiques sur le missel romain ; la traduction du premier volume a paru, Bruxelles, 1925.

Parmi les anciens, Lebrun, Explication littérale, historique et dogmatique de la messe, 1 vol., Paris, 1726, souvent réédité, garde toute sa valeur ; dom Claude de Vert, Explication simple, littérale et historique, 4 vol., Paris, 1720, avec quelques théories contestables, est toujours lu avec profit.

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