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METHODE DE CONST ANTINOPLE


sauts ; les moines furent frappés de la plus grande peine ecclésiastique, le xarâOsiia, sorte de malédiction canonique, et leurs adhérents soumis à l’excommunication, àvdc0£(j.a. Pitra, op. cit., p. 361 ; P. G., t. c, col. 1297 A. Saint Joarmice fut encore le soutien du patriarche dans sa lutte contre les dissidents ; sans doute doit-on à ses conseils redoutés un peu de la rigueur avec lesquels furent traités ces anciens compagnons de lutte ; ici encore la déposition parut la mesure opportune qui purgerait l’épiscopat et la direction des monastères des récalcitrants et des meneurs. Cf. Act. sanct., nov. t. ii, col. 382 et 431. Le patriarche dut aller fort loin dans ses répressions, car avant de mourir, il se crut obligé à une démarche peu en rapport avec son rôle de pasteur suprême et que son humilité peut seule expliquer. Conscient d’avoir dépassé la mesure (il crut en voir l’avis providentiel dans une maladie qui lui vint inopinément), il offrit des excuses et fit lever les censures. La dignité patriarcale fut cependant sauve en quelque manière ; ceux que l’on avait vu s’acharner le plus contre l’autorité, restaient soumis à certaines pénitences (èmxi[ii(x<.) ; c’était malgré tout beaucoup concéder sur le y.a.xâ.Qzia. auquel on avait cru d’abord pouvoir les soumettre. Cf. Vita, a. 17, P. G., t. c, col. 1260 AB.

Quel fut le sens de cette violente hostilité ? Dobschutz. qui le premier exposa cette question, en signale une double raison : 1° un motif d’amour-propre évincé (Méthode avait été élu contre quatre candidats studites ) ; 2° une attitude de principe qui avait toujours poussé ces moines à se faire les champions de l’indépendance de l’Église vis-à-vis de l’État. Cf. Dobschiitz, Methodios und die Studiten, dans Byzantin. Zeitschrift, 1909, t. xviii, p. 47 et 98. Ni l’une, ni l’autre de ces deux causes ne nous semblent réelles dans le cas présent. Nous ne voyons pas en effet que la main de la pieuse Théodora ait beaucoup pesé sur les destinées de l’Église. Certes bien des comptes durent être réglés avec le concours de la police ; mais les studites ne pouvaient blâmer le bon usage du pouvoir qu’ils détinrent tout entier sous le faible Michel II ; il ne tint même qu’à eux d’être à nouveau, au prix d’une concession, les maîtres de l’État, que les préférences du conseiller Manuel, en les introduisant à la cour, avaient mis à leur portée. D’autre part, si l’élection de Méthode ruinait leurs ambitions de parti, il ne leur fut pas moins sympathique au début. Cela tenait au souvenir de luttes et de souffrances communes, et aussi au fait que le nouveau chef de l’Église montrait au commencement, à l’égard des hérétiques même repentants, une rigueur, qui eût été la leur. Ainsi le mécompte, si grand fût-il, ne fit pas la division. Nous relevons même dans les sources un début certain de collaboration. Le personnage le plus en vue du monachisme byzantin depuis la mort de saint Théodore Studite (826) était bien, avec saine Joarmice, le moine stigmatisé Théophane. Or celui-ci, qui était à la tête des intransigeants, se laissa nommer au siège de Nicée ; bien plus, certains prélats s’étant élevés contre ce choix, Méthode alla jusqu’à le leur imposer. Vita Michælis Syncelli, op. cit., p. 252.

Ce coup du maître, plusieurs fois répété en faveur de gens dont les seuls titres à l’épiscopat semblaient être les blessures apparentes de la persécution iconoclaste, causa le premier schisme dont nous avons parlé. Le passage de la Vie anonyme qui désigne les candidats discutés s’applique clairement aux studites dont les principaux représentants portaient sur leur corps des traces visibles de tortures. On peut même y voir une allusion directe à un incident provoqué par le plus célèbre d’entre eux, Théophane Graptos. Les ordinations les plus critiquées, nous dit-on, furent celles que l’on fit èiti toïç ôpiajxês’jaaai t<x oîxeïa

Si’èÇaYY&aewç toxOt). Cf. P. G., t. c, col. 1257 C. Il est ici question de gens qui ont affiché leurs cicatrices et se sont ouvertement glorifié de leurs souffrances. Or rien n’explique mieux cette réclamation que l’invective lancée par Théophane à la face de l’impératrice en plein banquet de l’orthodoxie. Théodora avait cru opportun, en fixant l’inscription que le moine portait au front, de louer l’endurance du patient, en plaignant la cruauté de son bourreau. En dépit de la signature donnée le matin, Théophane avait vivement répliqué : « Augusta, nous réglerons cette affaire avec votre mari au tribunal du juge incorruptible. » Le patriarche Méthode relevant le propos avait dit : « Non, non, nos promesses s’accompliront certainement, et le mépris de ces gens (toûtcov) sera de nul effet. »

Les sources ne nous disent pas quelles furent les répercussions immédiates de ce dialogue assez vif, il signale nettement une minorité d’opposants. La mesure d’absolution votée par le synode en faveur de l’âme de Théophile, n’avait pu l’être qu’en vertu de la fameuse règle d’économie tant décriée par Théodore Studite ; elle blessait dans ses principes leur esprit d’intransigeance. Une réflexion tardive les ralliait au point de vue de Syméon de Mitylène, autre moine confesseur, qui le matin, ayant refusé de signer la formule d’absolution, avait été chassé de la ville avec ses partisans. A en croire l’hagiographe, ceux-ci étaient assez nombreux, âizaç ô tûv ôijloXoyvjtcTjv xaî ÔTCepopïcov Otaaoç ; cf. Acta græca SS. Davidis, Symonis et Georgii, dans Anal, bolland., t. xviii, p. 244, 245. Des envoyés vinrent bientôt prier Syméon de ne pas faire plus longtemps le jeu du démon qui troublait misérablement l’Église. Ibidem, p. 246. Le pieux moine se rendit aux vœux du patriarche, et il semble bien que l’on se réconcilia pour quelque temps. L’évêque Jean Kakasambas, déposé plus tard pour son zèle studite, fut dans cette crise l’auxiliaire de Méthode, cf. ibid, p. 245 ; d’autre part il est difficile de voir dans la translation solennelle des reliques de saint Théodore autre chose qu’une manifestation de sympathie à l’égard des studites (sur ce transfert, cf. C. Van de Vorst, La translation de S. Théodore Studite et de S. Joseph de Thessalonique, dans Anal. BolL, t. xxxii, 1913, p. 27 sq.). En plein schisme, cette initiative, outre qu’elle apparaîtrait souverainement impolitique, eût exposé à des troubles graves dont le chroniqueur nous eût révélé sinon le détail, au moins l’existence (tf. ibidem, les c. Il et 12 de la relation du transfert, p. 57, 1. 32-37, et p. 58, où l’entente et la jubilation sont universelles). Cette solennité ayant eu lieu le 26 janvier 844, P. G., t. xcix.col. 328 A, et t. cv, col. 904 B, voir Échos d’Orient, t. iv. p. 169, c’est donc après cette date que naquit le différend et que se produisit la rupture, à laquelle les frictions antérieures portaient des esprits qu’un demi-siècle de luttes et de rancunes avait rendus extrêmement chatouilleux.

L’occasion n’est avouée qu’à demi par les sources. mais o : i y voit clairement que ce fut le réveil de la querelle faite jadis aux patriarches Taraise et Nicéphore. On avait dû plus d’une fois dans les synodes tenus contre les iconoclastes bénir et acclamer leur mémoire ; Méthode crut pouvoir donner : ’i l’apologie un tour spécial, en condamnant les écrits où saint Théodore avait malmené ses deux saints prédécesseurs.

C’est dans cette proscription qu’un écrivain du xiir siècle, l’évêque d’Éphèse, Jean Chilas, voit la principale cause du schisme. Cf. P. G., t. c, col. 1295, note 1. Ce point de vue est pleinement ((infirmé par l’ordre communiqué nue moines révoltés d’avoir à brûler et à anathématiser les ouvrages de leur père ; c’est la condition sine qua non de leur réintégrati >n au sein de l’Église. Cf. P. G., ibid., col. 1293 C.