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administrée sous le gouvernement du roi par les gens des trois États, comme on disait alors : ce qui doit s’entendre d’une assemblée composée de représentants du clergé, de la noblesse et de la bourgeoisie. Cette constitution provinciale, comme les autres institutions politiques du moyen-âge, se retrouvait avec les mêmes traits dans presque toutes les parties civilisées de l’Europe, dans toutes celles du moins où les mœurs et les idées germaniques avaient pénétré. Il y a beaucoup de provinces d’Allemagne où les États ont subsisté jusqu’à la Révolution française ; là où ils étaient détruits, ils n’avaient disparu que dans le cours des dix-septième et dix-huitième siècles. Partout, depuis deux siècles, les princes leur avaient fait une guerre tantôt sourde, tantôt ouverte, mais non interrompue. Nulle part ils n’avaient cherché à améliorer l’institution suivant les progrès du temps, mais seulement à la détruire ou à la déformer quand l’occasion s’en était offerte et qu’ils n’avaient pu faire pis.

En France, en 1789, il ne se rencontrait plus d’États que dans cinq provinces d’une certaine étendue et dans quelques petits districts insignifiants. La liberté provinciale n’existait plus, à vrai dire, que dans deux, la Bretagne et le Languedoc ; partout ailleurs, l’institution avait entièrement perdu sa virilité et n’était qu’une vaine apparence.

Je mettrai à part le Languedoc et j’en ferai ici l’objet d’un examen particulier.

Le Languedoc était le plus vaste et le plus peuplé de