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Lille, Maubeuge, Mons ou Valenciennes. Mais pourquoi Aldebrandin, fixé dans la capitale de la Champagne, aurait-il été prendre pour modèle le dialecte de la Flandre française et du Hainaut? Admettrons-nous, sans autre indice que l'existence d'un groupe de manuscrits dontA est le type, que la première partie de la carrière française d'Aldebrandin a dû avoir pour théâtre la région wallonne de l'Ouest, et que c'est là, avant d'aller se fixer à Troyes, qu'il a rédigé son Régime du Corps? Ou bien, supposerons-nous qu'à Troyes même, notre médecin a pu avoir comme secrétaire un Wallon qui a tout naturellement donné au français de son maître l'habit phonétique de son parler d'origine, et non celui du parler champenois? Dans notre détresse, l'étude lexicographique du Régimedu Corps peut nous être secourable. Le ms. A, au chapitre des Ventouses, a un passage ainsi conçu (p. 42) : Li siste si est por les doleurs de flans et du bonnent et du ventrail et de la matris, ki vien[en]t par ventosité, oster. Bonnent, qui signifie « estomac », est une mauvaise leçon, car l'estomac est désigné, à ce qu'il semble, par ventrail. Les trois autres manuscrits portent boteri, bouteri, bouteril « nom- bril », et on ne peut douter qu'Aldebrandin ait employé sciemment ce dernier mot qui se lit, sans variantes, à la page 72, ligne 35 1. Or bonnent « estomac» ne paraît pas avoir été usité en dehors du pays wallon et peut-être de la région picarde2. Nous prenons donc là le scribe du ms. A en flagrant délit d'altération au profit du dialecte qu'il connaissait. D'autre part, bouteril « nombril» se dit dans une assez vaste contrée qui comprend essentiellement la Champagne et la 1. Le ms. italianisé (Arsenal, 2511) porte aussi boteril, comme je m'en suis assuré. 2. Cf.Remania, XXXIX, 205. 1