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PROLOGUE.

sur ses mystères ; nous y lisons ses secrets, nous les interprétons dans nos œuvres et les rendons sensibles aux hommes. Saisissant l’apparence fugitive des choses, nous fixons la réalité dans des formes plastiques immobilisées, et, donnant un corps à nos sensations, nous les traduisons à autrui en cherchant à les lui faire éprouver. Aider à ce noble commerce, c’est le râle de la critique. Mais il faut qu’elle soit à la hauteur de cette mission. Quant aux préceptes qui doivent diriger les études, c’est affaire aux maîtres de l’art.

Dernièrement j’eus la fortune de lire quelques pages écrites par M. Guillaume, l’éminent statuaire, à propos d’un enseignement élémentaire des beaux-arts. Je n’ai pas l’honneur de connaître M. Guillaume autrement que par ses ouvres : je n’ai pas été surpris de voir un artiste aussi supérieur écrire aussi bien sur un sujet qui lui est familier, et cela m’a confirmé davantage dans cette opinion que, pour bien parler sur les arts, il faut les connaître grammaticalement et par principes.

C’est un grand danger quand des hommes, abusant de leur esprit, se font un jeu de parier d’abondance sur des matières sérieuses qu’ils n’ont pas étudiées. La facilité à manier des paradoxes ne laisse pas que de leur permettre d’éblouir les per-