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bien si les hommes n’étaient décapés et trempés par ces procédés traditionnels. Mais aussi cet entraînement veut la guerre, parce que l’idée de la guerre ramasse en elle toutes les espérances et toutes les vengeances, qui sont nourries et comprimées, et enfin conduites là. C’est pourquoi cette corruption des jeunes et la guerre doivent être voulues ensemble ou niées ensemble. C’est pourquoi aussi j’attends beaucoup des femmes dès qu’elles seront juges de ces choses.

Sous une condition pourtant, et qui est singulière, c’est qu’elles abandonnent de leur côté un peu de cette pudeur d’esprit qui les détourne de penser à ce qui est laid, répugnant et vil. Car tout se tient, en ce difficile problème ; et, par les solides traditions d’une société fondée et maintenue par la guerre et pour la guerre, la pudeur féminine va aux mêmes fins que l’impudeur masculine ; ainsi la science des manières, qui veut que l’on n’use que de mots honnêtes, s’accorde avec l’art militaire, que l’on ne peut nommer honnêtement. D’où vient que Madame de Maintenon est aussi une espèce d’adjudant. Mes amis, tirons un fil après l’autre, sans quoi nous serrerons le nœud.