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toutes ses propriétés. Réfléchissez maintenant à ceci qu’un astronome ne fait pas autre chose que de déterminer ses objets par de telles relations, jusqu’à prononcer, après bien des perceptions mesurées, que c’est la terre qui tourne autour du soleil et autres choses semblables, et à prédire ce qui arrivera de ces mouvements, par exemple les éclipses, visibles de tel lieu. Il suffit maintenant de ces remarques.

CHAPITRE IX

DE L’OBJET

Lorsque Démocrite voulait soutenir que le soleil et la lune sont véritablement comme nous les voyons, grands comme ils ont l’air d’être, et à la distance où nous croyons les voir, il savait bien à quoi sa doctrine l’obligeait. Nul ne peut être assuré d’échapper aux aventures, dès qu’il s’embarque. Il est admis communément aujourd’hui, même pour ceux qui n’en connaissent pas bien les preuves, que le soleil est fort éloigné de nous, beaucoup plus que la lune, et donc qu’il est beaucoup plus gros que la lune, quoique leurs grandeurs apparentes soient à peu près les mêmes, comme cela est sensible dans les éclipses. On ne peut donc soutenir que l’objet que nous appelons soleil, le vrai soleil, soit cette boule éblouissante ; autant vaudrait dire que le vrai soleil est cette douleur de l’œil quand nous le regardons imprudemment. Il faut donc rechercher comment on est arrivé à poser ce vrai soleil, que personne ne peut voir ni imaginer, pas plus que je ne puis voir