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ABIGAÏL.

Pour remplir la promesse qu’il avait faite à Harley, Saint-John se hâta de se rendre chez la reine, afin de lui annoncer le fâcheux événement. L’excellente femme se montra péniblement affectée de cette nouvelle, et en même temps fort touchée du message de Harley. Elle exprima avec un sentiment affectueux l’espoir qu’il se rétablirait promptement et viendrait recevoir lui-même le témoignage de sa gratitude pour son dévouement.

Le lendemain, les deux chambres s’assemblèrent et rédigèrent des adresses pour manifester leur indignation de ce qu’ils appelaient l’infâme et barbare attentat commis sur la personne de M. Harley : on y suppliait la reine de donner des ordres pour que tous les papistes fussent expulsés des villes de Londres et de Westminster. Il fut ensuite décrété qu’attenter à la vie d’un conseiller privé était un acte de félonie.

Harley demeura pendant plus d’une semaine dans un état iaquiétant, car sa blessure s’était envenimée, et il ne fut entièrement rétabli qu’au bout d’un mois. Dès sa première sortie, il se rendit au palais de Saint-James pour remercier la reine, qui avait daigné envoyer fort souvent chercher de ses nouvelles à son domicile.

« Bénissons Dieu, s’écria Anne, que la malice de nos ennemis (car vos ennemis sont les miens) ait été mise en défaut ! Je saurai leur prouver que chaque démonstration de haine de leur part contre vous attirera de nouvelles faveurs sur votre personne. »

Lorsque sir Harley parut pour la première fois à la chambre des Communes, l’orateur qui se trouvait à la tribune lui adressa des félicitations sur son rétablissement, et Harley lui répondit avec une vive émotion :

« L’honneur que me fait la chambre surpasse tellement mes mérites, dit-il d’une voix tremblante, que tout ce que je pourrai faire, tout ce que je souffrirais même pour la nation dans le cours de ma vie, n’acquittera pas encore ma dette de reconnaissance pour vos bontés. Toutes les fois que je placerai ma main sur ma poitrine, je me rappellerai les remerciments que je dois à Dieu, le dévouement que j’ai voué à la reine, le zèle et la gratitude dont je suis le débiteur envers cette honorable assemblée. »

La rentrée de Harley aux affaires fut signalée par l’adoption