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ABIGAÏL.

— À cette occasion les deux chambres présenteront à Votre Majesté de loyales adresses, ajouta Godolphin, et nous avons tout lieu d’espérer que notre conduite sera approuvée, tandis que celle de nos ennemis ot de ceux de la patrie sera blâmée comme elle le mérite.

— N’en doutez pas, répliqua le prince Georges, on rendra témoignage des bons services de celui qui à si admirablement âdministré le trésor de Sa Majesté, comme de ceux du duc qui a commandé les armées de la Grande-Bretagne d’une manière si glorieuse !

— J’ose me flatter, ajouta Marlborough, que Sa Majesté daignera annoncer, dans sa réponse aux chambres, qu’à l’avenir elle ne placera sa confiance qu’entre les mains de ceux qui lui ont donné des preuves si réitérées de leur zèle pour le maintien de son trône et l’affermissement de la succession protestante.

— Je me rappellerai vos paroles, milord, répondit Anne avec froideur.

— Votre Majesté voudra bien rappeler, observa Godolphin, et il serait même à propos qu’elle insistât sur ce point, que tout ce qui est cher au peuple, et tout ce qui lui a été assuré par son sage gouvernement, serait perdu sans retour, si jamais le but du prétendant papiste était atteint.

— Assez, milord ! s’écria Anne avec mécontentement ; la leçon est suffisante.

— Du moment où l’invasion n’est plus à craindre, reprit Marlborough, je demande à Votre Majesté la permission de rejoindre ses troupes en Flandre. Le prince Eugène m’attend impatiemment à la Haye pour se concerter avec moi sur le plan de la campagne prochaine.

— Je vous accorde cette permission, répondit la reine ; quand comptez-vous partir ?

— Demain, répliqua le duc, à moins que Votre Majesté n’ait encore besoin de moi.

— J’aurai grand regret à me séparer de Votre Grâce, fit Anne ; mais je sais que vous allez remporter de nouvelles victoires pour moi, et mériter de nouveaux lauriers pour vous.

— Je pars pourtant âvec moins d’enthousiasme qu’à l’ordinaire, ma gracieuse souveraine, répondit le duc, et cela parce que je suis sûr de laisser derrière moi un ennemi insinuant,