Page:Ainsworth - Abigail ou la Cour de la Reine Anne (1859).pdf/239

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
233
ABIGAÏL.

— Et vous avez signé un acte pareil ? dit Harley bouleversé.

— Hélas ! oui, répliqua-t-elle.

— Quelle improdence ! s’écria Harley en se frappant le front. Allons, la duchesse est en réalité maîtresse de votre destin. Il faut céder, hélas ! au moment du triomphe.

— Oh ! ne me dites pas cela ! s’écria-t-elle ; je ne savais ce que je faisais. La duchesse ne me forcera pas à tenir ma promesse, et, si elle le fait, je ne me considérerai pas comme engagée.

— Ne vous faites pas d’illusion, répliqua Harley. La duchesse exigera l’accomplissement de votre engagement, et quoique je trouve, en effet, que vous n’êtes pas furcée à tenir votre parole, je connais assez la reine pour être sûr qu’elle respectera cet acte. Si j’avais appris plus tôt ce détail, nous aurions pu trouver un expédient ; mais à cette heure…

— Je suis que j’ai eu tort, reprit Abigaïl au désespoir ; serait-il donc trop tard pour sortir de cet embarras ?

— Je le crains, fit Harley, et pourtant nous essayerons. Très certainement, la duchesse garde ce coup de théâtre pour la fn, et, si nous parvenons à l’empêcher de s’en servir, nous n’aurons plus rien à craindre.

— Oh ! faites cela ! s’écria vivement Abigaïl, et je vous jure que je réunirai tous mes efforts pour vous aider à atteindre le but de votre plus haute ambition.

— J’agirai de mon mieux, répondit Harley ; mais, à moins de réussir à nous emparer de ce maudit papier, ah ! il me vient une idée !

— Quelle est-elle ? demanda Abigaïl.

— Je vous la communiquerai plus tard, répliqua-t-il. Ne soufflez mot de tout ceci, ni à la reine, ni à Mashan. Fiez-vous à moi seulement, et, quand le danger se présentera, nous serons en mesure de l’affronter. »

En disant ces mots, Harley ramena la jeune fille dans la salle de bal et la remit aux mains de son amant.

Au même instant, comme il s’efforçuit de se frayer uu chemin à travers la foule pour rejoindre la reine, il vit la duchesse s’éloigner d’Anne, et, malgré tout le soin qu’elle prenait de se contenir, Harley devina sur sa physionomie qu’elle venait de recevoir une nouvelle désagréable.

Persuadé que la reine lui avait tenu parole, Harley se décida