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ABIGAÏL.

— Ventrebleu ! s’écria Bimbelot, c’est là un départ bien précipité. Est-ce que Malbrouk part de nouveau pour la guerre ?

— Si par Malbrouk vous voulez dire le duc de Marlborough, Bamby, répliqua gravement Proddy, je ne crois pas qu’il parte, pour le moment du moins. Le sergent a été choisi pour porter des dépèches au général Cadogan, et vous comprenez que ces dépêches ne peuvent être confiées qu’à un homme sûr.

— Oui, je comprends parfaitement, répondit Bimbelot, qui adressa un regard significatif à Sauvageon, et quand part le sergent ?

— Il s’embarque pour la Hollande cette nuit même, dit Proddy.

— Vous entendez cela, dit Bimbelot en français à Sauvageon, il s’embarque ce soir pour la Hollande, comme porteur de dépèches ; il faut songer à l’arrêter.

— C’est bon, répliqua le caporal ; on y avisera.

— Que dites-vous, Bamby ? demanda Proddy avec anxiété.

— J’exprimais à mon camarade le regret que j’éprouvais du départ du sergent, répliqua Bimbelot ; voilà tout, mon brave cocher.

— Ah ! j’avoue que son absence va faire un vide dans mon cœur, fit Proddy en gémissant.

— Ce départ me sera cruel ! s’écria Bimbelot.

— Comme aussi à moi ! ajouta Sauvageon.

— Si nous pouvions mettre la main sur ces lettres, ce serait une bonne chance, observa Bimbelot en parlant français à son ami.

— On verra ! mais faites attention, répondit celui-ci, ce drôle-là a des soupçons.

— Ah çà ! qu’est-ce qui est drôle ? s’écria Proddy, par qui ce seul mot avait été compris. Ce n’est pas, que je sache, le départ du sergent, Savage John…

— Pas le moins du monde, reprit le caporal ; le sergent est un digne homme, et je suis désolé de son départ.

— Il faut aller prendre congé de lui, ajouta Bimbelot. À quelle heure quitte-t-il Marlboro’house ?

— Je l’ignore, fit Proddy, mais je me rends chez lui à cinq heures.

— Eh bien ! nous y passerons à sept heures ou un peu plus tard, dit Bimbelot tout en regardant son ami ; nous aurons