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ABIGAÏL.

ridor, et presque aussitôt mistress Plumpton et mistress Tipping se précipitérent dans la chambre, toutes deux à la fois, le visage empourpré et les yeux animés par la colère.

« Vous êtes très-malhonnète, Plumpton, de me pousser ainsi, s’écria mistress Tipping ; vous avez entièrement fripé ma toilette.

— C’est bien fait ! répliqua mistress Plumpton avec aigreur ; il ne fallait pas essayer de passer avant moi. Vous m’avez presque arraché mon bonnet et mes barbes.

— Je voudrais vous avoir débarrassée de votre faux tour, par la même occasion, reprit mistress Tipping.

— La paix ! la paix ! mesdames, interrompit le sergent ; laissez-moi vous supplier de ne point vous disputer, du moins ce soir. Vous êtes toutes deux admirablement mises ; il serait impossible de résister à vos charmes, si vous n’aviez pas l’air si grognon. »

Cette allocution produisit l’effet désiré ; la paix fut momentament rétablie. Mistress Tipping se hâta même avec la plus parfaite obligeance de rajuster la coiffure de mistress Plumpton, et mistress Plumpton mit quelques épingles à la robe de mistress Tipping.

Les deux dames étaient en grande toilette. L’une étalait sa volumineuse personne dans une robe écarlate, et l’autre avait orné son frêle petit corps d’un vêtement de satin orange.

Bientôt après, Fishwick, Parker, Timperley et les autres domestiques des deux sexes de la maison du duc, au nombre d’une douzaine, arrivèrent en masse dans la cuisine. Le sergent ac cueillit chacun d’eux avec une gracieuse parole. À peine avait-il fait le tour du cercle que Timperley, qui se tenait près de la porte afin d’introduire les invités, annonça M. Proddy et un ami.

Le cocher avait un aspect fort imposant. Il s’était vêtu d’un grand habit de velours écarlate rayé de jaune et galonné d’or avec le gilet assorti ; une immense cravate de mousseline entourait son cou et le laissait fort à l’aise.

Il se dirigea tout droit vers Scales en lui disant : « Permettez-moi, sergent, de vous présenter M. Mezausène, un jeune homme qui vient tout récemment d’obtenir une place dans la maison de Sa Majesté, et qui désire faire votre connaissance ; j’ai pris la liberté de l’amener avec moi.