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ABIGAÏL.

des louanges exaltées qui lui étaient prodiguées, aussi bien que des magnifiques récompenses qu’il reçut : car il avait les vertus d’un grand général : pour l’action, les plans et la stratégie, nul n’avait plus de savoir que lui. Aussi calme en présence de la mitraille que sous l’abri de sa tente, il savait profiter du plus léger avantage, en faire promptement une victoire, et compléter aussi sa victoire, non par un carnage inutile, car aucun homme ne montra jamais plus de miséricorde, mais en empêchant l’ennemi de se rallier. Sa douceur et sa magnanimité égalaient seules son courage et ses talents. En un mot l’Angleterre était fière de Marlborough, et cela à juste titre, car il était le plus illustre de ses enfants.

Ce n’était pas seulement au camp que le mérite du soldat éclatait ; il brillait d’une égale splendeur en sa qualité de diplomate : sa perspicacité, sa sagacité, ses rares counaissances en politique, combinées avec les manières les plusséduisantes, en faisaient un admirable négociateur dans les cours étrangéres. L’absence de Marlborough pendant la campagne de Flandre l’empécha de prendre une part active aux affaires de son pays ; il n’y participa que par correspondance, et se trouvait d’ailleurs habilement représenté par sa femme et par Godolphin.

Le duc revint à Londres vers la fin de novembre 1706, après avoir terminé sa quatrième campagne dans les Pays-Bas, laquelle fut remarquable, entre autres beaux faits d’armes, par la bataille de Ramillies dont il a été parlé plus haut, et eut pour résultat la soumission des principales villes de Flandre et du Brabant, et la reconnaissance du roi Charles III.

Dès son arrivée, Marlborough se rendit en carrosse à Saint-James ; mais, en dépit de ses efforts pour garder l’incognito, il fut reconnu, et en peu d’instants entouré d’une population immense, qui fit retentir l’air de ses cris. La réception de la souveraine et de son illustre époux ne fut pas moins flatteuse. Le prince Georges l’embrassa et la reine lui dit, après l’avoir remercié avec beaucoup d’émotion, « qu’elle ne serait jamais heureuse tant qu’elle ne lui aurait pas témoigné sa gratitude pour ses admirables services. »

Le lord-maire lui offrit aussi de superbes fêtes, qui furent suivies de l’invitation de toutes les corporations, et, comme les étendards gagnés à Blenheim avaient été placés à Westminster-Hall, les trophées conquis à Ramillies furent portés triompha-