— Qu’est-ce que tout cela veut dire ? s’écria Proddy.
— Silence ! fit sévèrement Scales, qui ajouta en ôtant son chapeau : Caporal, je suis votre serviteur.
— Et moi le vôtre, monsieur le sergent ! répliqua le Français en lui rendant son salut.
— Et maintenant, messieurs, à l’œuvre, s’écria Scales. Je serai prêt dans un clin d’œil, Bamby, ajouta-t-il en mettant habit bas.
— Je ne vous ferai point attendre, sergent, » répliqua Bimbelot qui suivait son exemple.
Le caporal s’avança alors vers son commettant, et lui remit son épée en ajoutant quelques mots à voix basse. Pendant ce temps-là, Proddy adressait la parole à Scales.
« Écoutez donc, sergent, si vous ne voulez pas annoncer à Savage John que je désire me battre avec lui, je vais le lui dire moi-même, fit-il.
— Je ne vous le conseille pas, répliqua Stales ; attendez au moins que j’aie fini.
— Mais je ne me soucie pas d’attendre, reprit le valeureux cocher. Caporal Savage John, ajouta-t-il à haute voix, puisque nos amis vont s’aligner, nous ferions tout aussi bien d’en faire autant pour ne pas rester oisifs.
— Avec beaucoup de plaisir, mon gros tonneau, dit le caporal en ricanant.
— Que dit-il ? demanda Proddy au sergent.
— Mais il se moque de vous, voilà tout, répondit Scales.
— En vérité ? hurla Proddy furieux. Jour de ma vie ! je forcerai sa bouche grimaçante à rire jaune. Ah ! il se moque de moi ! damnation ! Voyez-vous cette grande araignée, ce mufle de colosse, ce grand échalas affamé, qui a l’air de n’avoir mangé de sa vie que des crapauds ou des croûtes de fromage ? Allons ! défendez-vous, dégainez ! ou je vous pourfends comme une fouine que vous êtes ; comprenez-vous ?
— Parfaitement, monsieur, répliqua le caporal, dont les dents claquaient de rage. Vous êtes trop plein de bon vin, mon petit bravache ; que je ne manie une épée de ma vie si je ne répands un peu du bordeaux contenu dans votre panse.
— Puisque vous voulez absolument vous battre, Proddy, dit le sergent tout bas, suivez bien l’avis que je vous donne : votre adversaire est beaucoup plus grand que vous ; n’oubliez pas de recourir aux feintes.