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San Juan de la Maguana, dont les ranchos étaient étagés en amphithéâtre sur les pentes d’une haute colline, dernier contrefort des montagnes Noires, baignait le pied de ses dernières maisons dans la rivière, offrait l’aspect le plus charmant et le plus pittoresque ; avec ses constructions mauresques, à toits plats, badigeonnées au lait de chaux, et à demi-enfouies sous un fouillis de bananiers, de grenadiers, d’orangers et d’autres arbres, des régions intertropicales.

Telle était la ville dont soixante-cinq flibustiers avaient résolu de s’emparer par surprise.

Maintenant, pourquoi les frères de la Côte avaient-ils formé cette résolution ? c’est ce que nous allons expliquer en deux mots.

Lorsque Vent-en-Panne avait assisté, invisible, à l’entretien du Chat-Tigre avec le capitaine don Antonio Coronel gouverneur de San Juan de la Maguana, un fait l’avait frappé ; ce fait était celui-ci : Non-seulement le Chat-Tigre entretenait des intelligences avec le gouvernement espagnol, mais encore il avait à San Juan une habitation dans laquelle il se rendait souvent ; cette habitation renfermait des papiers précieux pour les flibustiers ; d’autres très-importants y avaient été déposés depuis quelques jours.

Vent-en-Panne avait résolu de s’emparer à tous risques de ces papiers ; qui, il en avait la conviction, l’aideraient à éclaircir le mystère dont s’entourait le Chat-Tigre, et lui révéleraient certaines particularités de la vie passée de cet homme ; particularités que le flibustier tenait surtout à connaître.

Le Chat-Tigre ne devait demeurer que deux ou trois jours à San Juan ; il fallait donc se hâter d’agir, si on voulait le surprendre, et s’emparer de ses papiers.

L’expédition avait été aussitôt résolue entre Vente-en-Panne et l’Olonnais ; le lendemain même, après s’être entendus avec quelques-uns de leurs amis, ils s’étaient mis en route, pour tenter la surprise de la ville.