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j’éprouve aujourd’hui, s’empara de moi, et au plus fort de la mêlée, au moment où tout semblait perdu, je tombai à genoux et d’une voix brisée par l’épouvante, je fis vœu à ma sainte patronne si elle me sauvait de ce danger terrible, de consacrer ma vie au service de Dieu ! ce vœu monta jusqu’au trône de l’Éternel, porté sur les ailes des anges. Alors il se fit un miracle ; vous et vos amis, que nous ne pouvions attendre, vous accourûtes à notre secours. Je fus sauvée, sauvée par vous de la mort d’abord, mais surtout du déshonneur. Voilà l’aveu que j’hésitais à vous faire ; plaignez-moi, mon ami, mon frère ; plaignez-moi, il ne me reste plus qu’un avenir de larmes et de douleurs.

— Oh ! mademoiselle, s’écria-t-il avec élan ne regrettez pas de m’avoir révélé ce secret douloureux, je suis fier et heureux de cette confiance, je saurai m’en montrer digne quoi qu’il arrive. Je vous sauverai, je vous le jure sur ma foi d’honnête homme, je vous sauverai ; car vous l’avez dit, vous êtes ma sœur, ma sœur chérie !

— Merci, monsieur ; peut-être ne nous reverrons-nous plus, mais en quelque lieu que je me trouve, votre souvenir me suivra et ma voix s’élèvera toujours vers le ciel pour prier pour vous.

— Ne plus vous revoir, mademoiselle ! s’écria le jeune homme avec exaltation ; mais se maîtrisant aussitôt : Quoi qu’il arrive mademoiselle, souvenez-vous du nom que vous m’avez donné ; je suis votre frère, un mot, un signe, à défaut de paroles, je vous obéirai comme un esclave quoi que vous exigiez de moi, vous avez mon serment, et jamais je n’ai failli à ma parole, mais nous nous reverrons plusieurs fois peut-être ; ne dois-je pas veiller sur vous : calmez votre frayeur, essuyez vos larmes, espérez, mademoiselle ; je ne suis venu dans cette ville que pour vous protéger ; ne le savez-vous pas ? et vous soustraire à tous les dangers qui vous menacent, et maintenant, au revoir, mademoiselle, retournez près de madame la duchesse ; ne lui faites pas