Quelques ignames, cachées sous la cendre, devaient remplacer le pain, et compléter ce repas des plus primitifs.
Lorsque le Poletais aperçut Vent-en-Panne, il vint à lui, lui serra la main, lui présenta sa gourde, remplie d’une excellente eau-de-vie, et sans plus de conversation il se remit au travail.
Nulle réception ne pouvait être plus cordiale et moins emphatique que celle-là ; Vent-en-Panne le comprit ; il s’assit au pied d’un énorme fromager, but une large rasade, alluma sa pipe et suivit avec intérêt le travail du Poletais.
Celui-ci était occupé à brocheter une peau ; voici en quoi consistait cette opération, véritablement très-simple.
Quand un boucanier avait tué un taureau, son premier soin était de lui enlever la peau ; cette peau était provisoirement roulée et attachée aux basses branches d’un arbre, puis le boucanier continuait sa chasse. Lorsque dix ou douze animaux avaient été tués à balle franche, car les boucaniers ne connaissaient pas d’autre méthode ; les chasseurs déroulaient les peaux et les chargeaient sur leurs épaules, parfois ils en portaient trois ou quatre chacun, et cela souvent pendant deux ou trois lieues, ce qui était excessivement pénible.
En arrivant au boucan, on commençait par brocheter les peaux ; c’est-à-dire qu’on les étendait sur le sol le poil du côté de terre, on les tendait le plus possible, au moyen de broches de bois très-affilées, enfoncées dans le sol à une profondeur de cinq ou six pouces ; ceci fait on répandait de la cendre de Gayac sur les peaux, et au moyen d’une pierre ponce, on les frottait à tour de bras pendant près d’une heure, puis on enlevait la cendre et on couvrait la peau de sel gemme ; la peau ainsi brochetée restait tendue vingt-quatre heures ; elle était considérée comme tannée et bonne à être vendue.
Voilà quel était le travail du Poletais, à l’arrivée de Vent-en-Panne.
Peu à peu les engagés du boucanier le rejoignirent ;