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Le docteur d’Herigoyen pria les assistants de ne pas faire attention à lui et de parler en toute liberté.

Dans son for intérieur, le docteur n’était pas fâché de connaître l’opinion véritable des Mexicains sur la guerre.

Les Mexicains sont les hommes les plus courtois qui existent.

Ils ont une politesse raffinée dont ils ne se départissent jamais.

Seulement, ils manient leur langue, si riche en métaphores et en mots à double entente, avec une habileté consommée.

Ils possèdent le secret de dire tout, sans qu’il soit possible de s’en fâcher.

L’expédition fut beaucoup blâmée pour son principe.

Ils la considéraient comme une affaire de Bourse, tentée pour enrichir quelques grands personnages, que l’on nomma en toutes lettres, dans une mauvaise cause, et d’une façon scandaleuse, au détriment de la nation française tout entière ; dont on mettait le prestige maladroitement en jeu.

Les Français ne connaissaient pas plus le Mexique, en 1865, qu’ils n’avaient connu l’Espagne en 1808.

Tout cela finirait fatalement par un échec, et l’armée française serait respectueusement conduite et escortée par les Mexicains jusqu’à Vera-Cruz.

On critiqua fort la tactique du général en chef, qui s’obstinait à manœuvrer contre des guérillas insaisissables, comme il le ferait contre des troupes européennes qui procèdent par masses.

Raousset Boulbon, dit un des convives, connaissait le Mexique, lui : avec deux cent soixante hommes, il réussit, en quinze jours, à s’emparer de toute la province de Sonora, qui est aussi grande que la France.

Mais c’était un chef de partisans, et il faisait la guerre comme on la lui faisait.

Les Français n’étaient pas aimés.

Chefs et soldats étaient trop pillards ils ne respectaient rien, se riaient de tout, et voulaient imposer leurs