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LES FRANCS TIREURS

— Oui, mon enfant, rassure-toi, répondit le chasseur : nous sommes en sûreté maintenant.

Justement au même instant les matelots, comme s’ils eussent voulu appuyer la parole du Canadien, ou peut-être plutôt dans le but de narguer les ennemis auxquels ils avaient si bravement échappé, commencèrent un de ces chants cadencés qui servent à régler la mesure et dont chacun répète les paroles en souquant sur les avirons.

Nous donnerons ici les premiers couplets de ce chant de bord, que nous traduisons plutôt comme spécimen de poésie maritime que pour sa valeur réelle.

Maître Lovel, après avoir tourné et retourné plusieurs fois dans sa bouche l’énorme chique qui lui gonflait la joue droite, fit signe aux matelots de la péniche et entonna le premier d’une voix rauque ce refrain que tous reprirent en chœur après lui :

Des flots mouvants
Avec nos rames
Fendons les lames
Malgré les vents ?

Ce chant, accompagné en sourdine par le bruit de la mer et le sifflement de la brise, courait sur le dos des lames et allait ironiquement mourir aux oreilles des Mexicains rassemblés sur la plage.

— Allons, les gars ! reprit maître Lovel, attention à nager ensemble !

Et il reprit :

Le capitaine a dit qu’en Chine
Nous trouverions des lingots d’or,