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LES FRANCS TIREURS

— Oh ! s’écria-t-il avec désespoir, perdue ! mon ! Dieu, perdue !

Carméla comprit qu’il ne lui restait plus d’espoir. Appuyant alors le poignard sur sa poitrine :

— Un pas de plus, cria-t-elle au Scalpeur, et je tombe morte à vos pieds !

Malgré lui, cet homme fauve, terrifié par la résolution qu’il voyait étinceler dans l’œil de la jeune fille, hésita une seconde ; mais reprenant presque aussitôt toute sa férocité :

— Que m’importe, s’écria-t-il, pourvu que tu ne sois à personne !

Et il s’élança vers elle en poussant un hurlement sauvage.

Épouvanté du danger immense que courait sa fille, le chasseur réunit toutes ses forces, et par un effort surhumain il se retrouva debout et menaçant devant son ennemi.

Les deux hommes échangèrent un regard terrible et se précipitèrent l’un vers l’autre.

Carméla presque morte de terreur gisait étendue entre les deux ennemis, formant avec son corps une barrière qu’ils n’osèrent franchir, mais par-dessus laquelle ils croisèrent leurs machetes dont les lames se froissèrent avec un bruit sinistre.

Malheureusement, Tranquille, affaibli par sa blessure, ne pouvait, malgré son indomptable courage, longtemps soutenir ce combat acharné, et par conséquent ne retardait que de quelques minutes l’effroyable catastrophe qu’il voulait empêcher. Il le comprit aussi, car, tout en maniant son machete avec une dextérité peu commune, et ne laissant pas à son adversaire le temps de respirer, il jeta un re-