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LES FRANCS TIREURS

vieillard dont je pourrais être la fille, et que vous ne rougissez pas de me proposer, sous je ne sais quel prétexte ignoble de ressemblance avec une femme que sans doute vous avez tué, de vous aimer.

— Carméla !

— Je vous méprise enfin, parce que vous êtes une bête féroce qui, de tous les sentiments humains, n’en possédez qu’un seul, l’amour du meurtre ! que pour vous il n’existe rien de sacré, et que si j’étais assez folle pour consentir à ce que vous exigez, vous me feriez mourir de désespoir, en me broyant le cœur comme à plaisir !

— Prenez garde, Carméla ! s’écria-t-il avec rage, en faisant un pas vers elle.

— Des menaces ! continua-t-elle d’une voix éclatante. Eh ! ne sais-je pas que tout est préparé déjà pour mon supplice ? Appelez vos esclaves, mon maître, faites-moi torturer ! Mais sachez-le, jamais, jamais, entendez-vous, je ne consentirai à vous obéir. Je ne suis pas aussi abandonnée que vous vous plaisez à le supposer ; j’ai des amis que j’aime et qui m’aiment aussi. Hâtez-vous ! Qui sait, si vous ne me tuez pas aujourd’hui, si je ne me délivrerai pas demain ?

— Oh ! c’en est trop, dit le Scalpeur-Blanc d’une voix basse et inarticulée, tant d’audace ne restera pas impunie. Ah ! tu comptes, folle enfant, sur tes amis ! mais ils sont loin, fit-il avec un rire amer ; nous sommes en sûreté ici, et je saurai, entends-tu, je saurai te courber sous ma volonté.

— Jamais ! s’écria-t-elle avec exaltation.

Et se précipitant vers lui, elle s’arrêta presque à le toucher en ajoutant :