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LES FRANCS TIREURS.

— Nullement, commandant, répondit le capitaine ; vous allez être conduits au fort de la Pointe, dont l’enceinte, jusqu’à nouvel ordre, vous servira de prison.

— Comment ! fit avec étonnement le vieux marin, au fort de la Pointe !

— Oui, répondit en souriant le capitaine, au fort de la Pointe, dont quelques-uns de mes amis s’emparaient tandis que moi-même j’avais l’honneur d’amariner votre belle corvette, commandant.

Le capitaine aurait pu longtemps encore parler sur le même ton ; le vieil officier, confondu par ce qu’il venait d’entendre, était incapable de rassembler deux idées de suite.

Enfin, il laissa tomber avec découragement sa tête sur sa poitrine, et faisant signe à ses officiers de le suivre, il monta sur le pont.

Une embarcation armée par dix hommes se balançait à la coupée de tribord.

Le commandant, toujours silencieux, y descendit ; son état-major l’imita.

— Pousse ! ordonna El Alferez qui, assis à l’arrière, tenait la barre.

L’embarcation déborda, et bientôt elle disparut. Pendant quelques instants encore, on entendit le bruit cadencé des avirons qui tombaient dans la mer ; puis, peu à peu tout rentra dans le silence.

Le capitaine avait assisté au départ de ses prisonniers. Lorsque le canot se fut perdu dans l’obscurité, il donna l’ordre à maître Lovel de lever l’ancre et de mettre le cap au large, puis il redescendit dans sa chambre.

Un homme l’y attendait.