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LES FRANCS TIREURS.

Tout à coup ils virent une masse noire tourbillonner à un mètre d’eux et s’enfoncer dans l’eau. Le Jaguar plongea immédiatement et la ramena au niveau de la mer. Cette masse dont ils n’avaient pu, à cause de l’obscurité, distinguer la forme, était le corps de John Davis.

Il était temps que les deux hommes arrivassent. À bout de forces, se reconnaissant vaincu dans la lutte opiniâtre qu’il avait si longtemps soutenue contre la mort, l’Américain se laissait couler. Cependant il n’avait pas entièrement perdu connaissance.

Maintenu au-dessus de l’eau, il aspira l’air à pleins poumons, et fut bientôt en état de répondre aux questions que lui adressaient ses compagnons.

— Êtes-vous blessé ? demanda le Jaguar.

— Oui.

— Qu’avez-vous ?

— Je crois avoir l’épaule démise : le monstre en mourant m’a asséné un coup de queue qui m’a presque fait évanouir. Sans vous j’étais perdu. Mais ce n’est que partie remise ; adieu et merci ! ne perdez pas plus de temps avec un homme à demi mort.

— Nous ne vous abandonnerons pas si vous ne vous abandonnez pas vous-même, John ! Nous sommes ici, Lanzi et moi deux hommes vigoureux prêts à tout faire pour vous sauver.

— Nous sommes trop loin de terre.

— Vous vous trompez, nous la touchons presque ; encore quelques brassées, et nous trouverons pied. Laissez-nous faire.

— Soit, puisque vous le voulez.