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LES FRANCS TIREURS.

membrane, fixé sur lui avec une expression de froide méchanceté.

Le Jaguar s’élança en faisant un crochet, remonta au niveau de l’eau et se retourna en saisissant son poignard. Au même instant, le ventre argenté du monstre se montra tandis qu’il ouvrait sa gueule énorme, armée de ses redoutables dents, hérissées comme les pointes d’une herse.

Le Jaguar plongea de toute sa force son poignard dans le ventre du monstre et le lui fendit dans un tiers au moins de sa longueur.

Frappé à mort, la hideuse tintorera fit un bond énorme en battant follement l’eau à droite et à gauche, et retomba. Elle était morte.

Le Jaguar, à demi aveuglé par l’eau sanglante lancée par le monstre, et ballotté dans le remous causé par son agonie, fut près d’une minute à reprendre ses esprits. Cependant, par un effort suprême, il revint sur l’eau, aspira l’air avec force et étouffa un cri de triomphe en voyant auprès de lui le corps inanimé de son ennemi que la lame balançait.

Sans s’arrêter davantage, il jeta autour de lui un regard anxieux.

— C’est fait ! lui cria une voix peu éloignée.

— Est-ce vous, Lanzi ?

— C’est moi ! répondit le métis d’une voix aussi calme que s’il se fût trouvé tranquillement à terre.

— Eh bien ?

— Le requin est mort.

— Au troisième, alors ! Je ne vois pas John Davis.

— Allons !