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LES FRANCS TIREURS.

reusement. Seulement, comme tous ces hommes nageaient comme des loutres, et qu’ils avaient l’habitude de l’élément perfide sur lequel ils se trouvaient, ils ne dépensaient que la somme de force nécessaire pour ne pas se fatiguer inutilement, et ils avaient grand soin de constamment se maintenir à la hauteur les uns des autres.

Enfin, après des efforts surhumains, ils parvinrent à couper le courant qui s’engouffrait avec une rapidité et une force extrêmes dans la passe. Le plus fort était fait : maintenant ils n’avaient plus, pour ainsi dire, qu’à se laisser doucement porter à terre, en ayant soin cependant de conserver la bonne direction.

— Courage ! dit le Jaguar.

Ce mot, le premier que le jeune homme eût prononcé depuis le départ, rendit les forces à ses compagnons et réveilla leur ardeur.

La forteresse détachait sa masse sombre et imposante à peu de distance en avant.

Les conjurés nageaient maintenant au milieu de l’ombre projetée par le rocher.

Tout à coup un cri traversa l’espace et troubla le silence.

Tintorera !

Une masse brillante venait au-devant des conjurés, laissant derrière elle une longue trace phosphorescente.

— Tintorera ! cria une seconde voix.

En effet, un autre requin s’avançait de la haute mer et nageait droit vers les conjurés en traçant une ligne de feu.