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LES FRANCS TIREURS

— Chacun à son poste de combat, dit-il ; que les gabiers s’occupent à déblayer le navire, tandis que les charpentiers prépareront tout pour mettre un autre beaupré en place.

Et quittant son banc de quart, le commandant s’avança résolument vers les mutins ; ceux-ci, au fur et à mesure qu’il avançait, reculaient, sans parler, sans gesticuler, mais opposant encore cependant cette dernière résistance, la plus redoutable de tous, la force d’inertie.

Cependant c’en était fait de la révolte ; l’équipage, ébranlé par la conduite ferme et sage de son chef, n’allait pas tarder à rentrer dans le devoir, lorsqu’un incident inattendu vint changer complètement la face des choses et replacer les officiers du bâtiment dans la situation critique dont leur chef les avait fait si facilement sortir.

Nous avions dit que doña Mencia et ses deux compagnons suivaient attentivement les péripéties de cette scène, prêts à intervenir dès que besoin serait. À peine le commandant Rodriguez eut-il quitté son banc de quart, que la jeune fille ou le jeune homme, ainsi qu’il plaira au lecteur de nommer cet être mystérieux, s’y élança, et saisissant une longue-vue, il la braqua dans la direction du brick, afin de bien relever la position du corsaire et s’assurer sans doute qu’on aurait au besoin un appui efficace.

Le brick n’était plus qu’à deux encablures de la corvette ; encore quelques minutes et il arriverait à portée.

Tout à coup doña Mencia, abandonnant sans transition son rôle de femme, déchira d’un mouvement brusque et rapide la robe qui la couvrait, enleva sa