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LES FRANCS TIREURS.

donnée, tourna majestueusement sur lui-même. Au moment où il faisait son abattée et où il présentait son avant par le travers de la corvette, maître Lovel, qui épiait l’occasion favorable d’exécuter l’ordre qu’il avait reçu, tira vivement le cordon de la batterie et fit feu.

Les Mexicains, confondus de cette agression subite à laquelle ils étaient loin de s’attendre de la part d’un ennemi si faible en apparence, ripostèrent avec furie, et un ouragan de fer et de plomb vint s’abattre avec un fracas horrible sur le pont et dans la mâture du bâtiment américain qu’il enveloppa de fumée.

Le fort et la batterie continuaient à garder la plus stricte neutralité.

Le capitaine Johnson ne se donna pas la peine de riposter.

— Oriente au plus près du vent ! dit-il ; hale les boulines ! C’est assez nous amuser, garçons !

Et le brick continua sa route.

Lorsque la fumée fut dissipée, l’on aperçut la corvette mexicaine.

Elle était dans un état pitoyable.

Le coup de canon tiré par maître Lovel lui avait coupé son beaupré au ras de la poulaine, ce qui avait naturellement entraîné la chute du mât de misaine ; et la pauvre corvette, à demi-désemparée et mise dans l’impossibilité de poursuivre plus longtemps son audacieux adversaire, s’occupait tristement et en toute hâte à réparer les avaries majeures qu’elle avait éprouvées.

À bord du brick, grâce à la précipitation avec laquelle les Mexicains avaient riposté, l’on n’avait eu