Page:Aimard - Les Francs-tireurs, 1866.djvu/322

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
314
LES FRANCS TIREURS

Le capitaine Johnson était à cette époque un homme de trente-trois ans à peine, d’une taille au-dessus de la moyenne ; ses gestes étaient simples, gracieux et remplis d’une élégance naturelle ; ses traits étaient mâles et accentués, et ses yeux noirs dans lesquels rayonnait l’intelligence imprimaient à sa physionomie une expression de grandeur, de force et de loyauté.

— Bonjour, père, dit-il à maître Lovel en lui tendant cordialement la main.

— Bonjour, garçon, répondit celui-ci, as-tu bien dormi ?

— Très-bien, merci, père. Qu’avons-nous de nouveau ?

À cette question si simple en apparence, le lieutenant se redressa, porta la main à son chapeau et répondit avec déférence.

— Capitaine, il n’y a rien de nouveau à bord ; j’ai fait virer lof pour lof le brick à trois heures, et selon vos ordres nous courons la longue bordée au plus près du vent, filant six nœuds deux tiers à l’heure, les perroquets dessus et tenant toujours la pointe de Galveston par la hanche de bâbord.

— C’est bien, répondit le capitaine, en jetant un coup d’œil sur le compas et sur la voilure.

Pour tout ce qui regardait le service, maître Lovel, malgré les observations réitérées de son chef, avait toujours conservé vis-à-vis de lui le ton et les manières d’un subordonné devant son supérieur ; le capitaine, voyant que c’était un parti pris de la part du vieux marin, avait fini par ne plus y faire attention, et il le laissait libre de lui parler à sa guise.