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LES FRANCS TIREURS.

cesse. Le temps me manque en ce moment pour vous expliquer certaines choses que vous devez savoir, demain nous nous verrons.

— Où et à quelle heure ?

— Au Salto del Frayle, à deux heures de l’après-dîner.

— Pourquoi si loin et si tard, frère ?

— Parce que d’ici là il se passera quelque chose que je ne puis vous dire à présent, qui m’obligera sans doute à traverser la baie et à me réfugier en terre ferme.

— Je n’ai pas le droit de vous demander l’explication de vos paroles, frère ; mais prenez garde : quoi que vous tentiez, vous aurez affaire à un rude adversaire ; le général est furieux contre vous, il a une revanche à prendre, et si vous lui en fournissez l’occasion, il ne la laissera pas échapper.

— J’en suis convaincu, mon ami, mais le sort en est jeté ; malheureusement nous suivons chacun une voie différente. Dieu aidera le bon droit. Votre main encore une fois, et adieu.

— Adieu, frère, et à demain, c’est convenu.

— La mort seule m’empêcherait de me rendre au rendez-vous que je vous assigne.

Les deux ennemis politiques, si cordialement liés ensemble, se pressèrent la main et se séparèrent.

Le colonel s’enveloppa dans son manteau, quitta le salon et sortit immédiatement de la maison.

Le général s’était éloigné en intimant au détachement posté aux environs de la maison, de le suivre ; la rue était complétement déserte.

Le Jaguar était si intimement convaincu de la fidélité avec laquelle le général Rubio remplirait ses