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LES FRANCS TIREURS

— Fort bien ; mais jusque-là, je vous ferai observer que vous vous êtes introduit chez moi d’une façon contraire aux lois, que le domicile d’un citoyen est inviolable, et que ce que vous avez fait aujourd’hui, le juez de lettras seul, porteur d’un mandat d’amener en bonne et due forme, avait le droit de le faire.

— Peut-être auriez-vous raison, caballero, si nous nous trouvions en temps ordinaire ; mais en ce moment, ce n’est plus cela : l’État est en état de siége, le pouvoir militaire a remplacé le pouvoir civil, et c’est moi seul qui ait le droit d’ordonner et de faire exécuter les mesures relatives au maintien du bon ordre.

Le jeune homme, pendant que parlait le général, avait à la dérobée jeté un regard sur la pendule. Lorsque le gouverneur se tut il se leva, et le saluant cérémonieusement :

— Pour être bref, lui dit-il, soyez assez bon, monsieur, pour m’expliquer catégoriquement et sans plus de détours les motifs de votre présence chez moi. Voilà longtemps déjà que nous causons sans que cet entretien me fasse rien entrevoir de vos intentions. Je vous serais donc obligé de me les faire connaître sans retard, parce que des affaires importantes réclament ma présence au dehors et que si vous vous obstiniez à demeurer ici je me verrais forcé de vous y laisser seul.

— Oh ! oh ! vous changez de ton, il me semble, caballero, répondit le général avec une légère ironie ; ces motifs que vous voulez connaître je vais vous les dire ; quant à quitter la maison, sans moi ou sans mon autorisation, ce qui est