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LES FRANCS TIREURS

— Caballero, répondit le général avec un mouvement d’impatience, je suis peiné de rencontrer en vous cette raideur et ce parti pris de mauvais vouloir ; à mon entrée dans cette maison, mes intentions ne vous étaient peut-être pas aussi hostiles que vous le supposez ; mais puisque vous me contraignez à une explication claire et catégorique, je suis prêt à vous satisfaire et à vous prouver que je connais non-seulement votre conduite, mais encore les projets que vous nourrissez et dont vous poursuivez l’exécution avec une audace et une ténacité qui, si je n’y prenais garde, amèneraient inévitablement leur succès dans un avenir prochain.

Le jeune homme tressaillit intérieurement, un éclair jaillit de sa fauve prunelle à cette insinuation directe qui lui révélait le danger dont il était menacé ; mais reprenant instantanément sa présence d’esprit et éteignant le feu de son regard, il reprit froidement :

— Je vous écoute, général.

Celui-ci se tourna vers ses officiers.

— Faites comme moi, señores, dit-il en s’asseyant, prenez des siéges, puisque ce caballero refuse de nous en offrir. Cette conversation amicale peut se prolonger encore longtemps, il est inutile que vous vous fatiguiez à l’écouter debout. Les officiers s’inclinèrent et ils s’installèrent commodément sur les butaccas dont l’appartement était garni.

Le général reprit après quelques minutes de silence, pendant que le jeune homme le considérait d’un œil indifférent, en tordant une cigarette de paille de maïs :