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LES FRANCS TIREURS.

— Vous vous trompez, général, c’est celui d’un homme libre justement indigné.

— Soit, je ne discuterai pas avec vous ; mais vous me permettrez de vous faire observer que pour un homme si justement indigné, et si seul en apparence, vous vous faites garder bien soigneusement ; car, si la maison est vide, ainsi que vous le dites, les alentours en sont surveillés par des affidés qui, je dois le reconnaître, s’acquittent à merveille de la mission dont ils sont chargés en vous prévenant assez à l’avance des visites imprévues pour que vous preniez vos précautions en conséquence, et qu’il vous soit loisible de faire disparaître en un clin d’œil les personnes dont la présence ici pourrait vous compromettre.

— Au lieu de parler ainsi par énigmes, général, peut-être vaudrait-il mieux nous expliquer clairement ; alors sachant ce qu’on m’impute, peut-être pourrai-je tenter de me défendre.

— Qu’à cela ne tienne, caballero, rien n’est plus facile ; seulement vous me permettrez de vous faire remarquer que depuis assez longtemps déjà nous causons ensemble et que vous ne m’avez pas encore offert un siége.

Le jeune chef jeta au général un regard ironique.

— Pourquoi userais-je envers vous de ces banales formules de politesse, général ? Dès l’instant où, sans mon autorisation et contre ma volonté, vous vous êtes introduit dans cette maison, vous avez dû vous considérer comme étant chez vous. C’est donc moi qui ne suis plus qu’un étranger ici ; dans cette position, il ne m’est plus permis de faire les honneurs de cette demeure.