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LES FRANCS TIREURS.

marchaient côte à côte le Jaguar, le Scalpeur-Blanc et John Davis.

— Bravo, murmura le jeune homme, tout nous favorise.

— Attendons la fin grommela l’Américain, dont les soupçons, loin de diminuer, ne faisaient au contraire qu’augmenter d’instant en instant.

Cependant au lieu de sortir du camp du côté de l’hacienda dont la sombre silhouette se dessinait sinistre et menaçante au sommet de la colline, le Scalpeur fit faire un long circuit à la colonne qui côtoya les derrières du camp.

Le plus profond silence régnait dans la plaine, le camp et l’hacienda semblaient dormir, pas une lumière ne luisait dans l’ombre, on aurait cru en voyant un calme aussi profond que la plaine était déserte, mais ce calme factice renfermait dans ses flancs une tempête terrible prête à éclater au premier signal.

Ces hommes qui marchaient à pas de loups, sondant les ténèbres autour d’eux et le doigt placé sur la détente du rifle, sentaient battre leurs cœurs d’impatience d’en venir aux mains avec leurs ennemis.

Singulière coïncidence, étrange fatalité qui faisait à la même heure, pour ainsi dire au même moment, tenter une double surprise par les assiégeants et les assiégés et lançait à l’aveuglette les uns contre les autres des hommes qui chacun de leur côté s’avançaient avec l’espoir d’une réussite certaine, et convaincus qu’ils allaient surprendre endormis les ennemis trop confiants qu’ils brûlaient d’égorger.