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LES FRANCS TIREURS

croyez-vous donc que ce soit pour rien que je me suis dérangé ? Non, non ; de sérieux motifs m’amènent auprès de vous, et je me trompe fort, ou ce temps que maintenant vous regrettez de m’accorder, vous reconnaîtrez bientôt que vous ne pouviez mieux faire que de l’employer à m’entendre.

Le Jaguar haussa les épaules avec impatience ; il lui répugnait d’user de violence envers un homme qui, après tout, n’était pas sorti vis-à-vis de lui des bornes de la plus stricte politesse, et puis malgré lui une espèce de pressentiment secret l’avertissait que la visite de ce vieillard singulier lui serait utile.

— Parlez donc, lui dit-il, au bout d’un instant, du ton d’un homme qui se résigne à subir une chose qui lui déplaît, mais à laquelle il ne peut se soustraire, seulement soyez bref.

— Je n’ai pas assez l’habitude de la parole pour me plaire à faire de longs discours, répondit le Scalpeur ; je ne dirai que les choses strictement indispensables pour être bien compris de vous.,

— Faites donc sans plus de préambules.

— Soit. Je reviens maintenant à la seconde question que vous m’avez adressée ; vous m’avez demandé quelle raison m’amenait ici. Je vous le dirai bientôt, mais je répondrai d’abord à votre troisième question : comment je suis parvenu jusqu’à vous,

— En effet, s’écria le Jaguar, cela me semble extraordinaire !

— Pas aussi extraordinaire que vous le supposez : je pourrais vous dire que je suis un trop