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LES FRANCS TIREURS.

même, chargeant au péril de sa vie les canons et les tirant contre les insurgés.

Tant de courage avait frappé ceux-ci d’une si grande admiration que, bien que maintes fois il leur eût été facile de tuer leur téméraire ennemi, toujours leurs rifles s’étaient détournés de cet homme qui semblaient comme à plaisir braver à chaque instant une mort certaine.

Le Jaguar, tout en serrant la place de près, et en désirant vivement s’en emparer, avait donné l’ordre péremptoire d’épargner la vie de son ami, qu’il ne pouvait s’empêcher de plaindre et d’admirer autant pour son courage que pour son dévouement à la cause qu’il servait.

Bien qu’il fût près de minuit, le colonel était debout ; au moment où le chasseur fut introduit auprès de lui, il se promenait d’un air soucieux dans sa chambre à coucher, consultant de temps en temps un plan détaillé des fortifications de la place déplié sur une table.

L’arrivée de Tranquille lui causa une vive satisfaction, il espérait avoir par lui des nouvelles du dehors.

Malheureusement le chasseur ne savait pas grand’chose sur les affaires politiques du pays, à cause de la vie isolée qu’il menait dans les forêts.

Cependant il répondit avec la plus grande franchise à toutes les questions qu’il plut au colonel de lui adresser et lui donna les quelques renseignements qu’il avait pu obtenir ; puis il lui rapporta les divers incidents de son voyage. Au nom de Carméla, le jeune officier se troubla légèrement et une vive rougeur empourpra son visage, cependant il se re-