Page:Aimard - Les Francs-tireurs, 1866.djvu/181

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
173
LES FRANCS TIREURS.

soixante à quatre-vingt mille chevaux, et où les pièces d’artillerie se comptent par plusieurs centaines, se feront difficilement une idée de la façon dont on fait la guerre dans certaines parties de l’Amérique, ainsi que la force de la composition des armées du Nouveau-Monde.

Il faut, comme le Mexique, compter plusieurs millions d’habitants pour réunir dix mille hommes sous les armes, chiffre énorme pour ces contrées.

Les différentes républiques qui se sont formées à la suite du démembrement des colonies espagnoles, telles que le Pérou, le Chili, la Nouvelle-Grenade, la Bolivie, le Paraguay, etc., ne peuvent réussir à réunir plus de deux ou trois mille soldats sous leurs drapeaux, et encore au moyen d’immenses sacrifices, car ces contrées qui, territorialement parlant, sont chacune beaucoup plus étendues que la France, sont à peu près désertes, décimées sans cesse par la guerre civile qui les ronge comme une lèpre hideuse, et rendues presque inhabitables par l’incurie des divers gouvernements qui se succèdent les uns aux autres avec une rapidité vertigineuse et pour ainsi dire fantastique.

Ces gouvernements, subis plutôt qu’acceptés par ces nations infortunées, impuissants pour le bien à cause de leur durée précaire, sont tout-puissants pour le mal et en profitent pour pressurer les peuples et gorger de richesses leurs créatures sans s’inquiéter du gouffre qu’ils ouvrent sous leurs pas et qui toujours plus profond finira dans un temps, hélas ! trop prochain, par engloutir toutes ces nationalités de hasard qui seront mortes avant que de naître, et de la liberté n’auront connu que le mot