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LES FRANCS TIREURS.

apprécié la loyauté et l’intelligence du mayordomo de l’hacienda. Aussi ces deux hommes, qui s’étaient mutuellement compris, avaient-ils contracté une liaison assez intime.

— Encore un jour de passé, dit le colonel, sans qu’il nous soit possible de rien savoir des mouvements des insurgés ! Cela ne vous semble-t-il pas extraordinaire, don Félix ?

Le mayordomo lâcha une bouffée de fumée par les narines et par la bouche, saisit sa cigarette de paille de maïs entre le pouce et l’index, et après en avoir secoué la cendre avec l’ongle du petit doigt :

— Très-extraordinaire, dit-il sans détourner la tête et en continuant à regarder fixement le ciel.

— Quel homme singulier vous êtes ! rien ne vous émeut, reprit don Juan avec dépit. Tous nos batteurs d’estrade sont-ils de retour ?

— Tous.

— Et toujours sans nouvelles ?

— Toujours.

— Vive Dios ! votre flegme ferait jurer un saint. Que regardez-vous donc si fixement au ciel ? Croyez-vous que c’est là que nous trouverons les renseignements dont nous avons besoin ?

— Peut-être, répondit sérieusement le mayordomo. Étendant alors la main dans la direction du N. 1/4 E. :

— Regardez, fit-il.

— Eh bien ? dit le colonel en fixant les yeux vers la direction indiquée.

— Vous ne voyez rien ?

— Ma foi, non.

— Pas même ces troupes de hérons et de flamants