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au moine, avaient complétement disparu ; l’absence des étoiles, qui ne se montraient pas encore, laissait dans le ciel une profonde obscurité, plus profonde encore sous le couvert ; tout commençait à s’effacer pour ne plus laisser distinguer çà et là, à une courte distance, que quelques touffes d’arbres dessinant leurs masses plus sombres dans la nuit, ou quelques flaques d’eau formées par le dernier orage, qui semaient la forêt de taches plus pâles. La brise du soir s’était levée, et on l’entendait frissonner à travers les feuilles avec des plaintes mélancoliques et lugubres.

Les hôtes redoutables du désert avaient abandonné leurs mystérieux repaires, ils faisaient craquer les branches mortes en s’avançant à pas pressés, au milieu d’un concert assourdissant de mugissements félins.

Le moine n’avait pas un instant à perdre s’il ne voulait être assailli de tous les côtés à la fois par les bêtes fauves, qu’un long jeûne rendait plus redoutables encore.

Après avoir jeté un regard investigateur autour de lui, afin de s’assurer que nul pressant danger ne le menaçait, le moine fit dévotement le signe de la croix, se recommanda à Dieu avec une ferveur plus sincère que certes il ne l’avait fait jusqu’alors, et, prenant brusquement son parti, il se mit résolument en devoir d’escalader l’amas de bois qu’il avait réuni au pied de l’arbre afin de lui servir de marchepied.

Après quelques tentatives infructueuses, il parvint enfin à monter sur le sommet de ce monticule factice.