Page:Aimard - Les Francs-tireurs, 1866.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
127
LES FRANCS TIREURS.

— Arrêtez ! mon père, dit vivement Carméla en lui retenant le bras, peut-être est-ce un pauvre malheureux perdu dans la forêt et qui a besoin de secours.

— Au fait, c’est possible, reprit Tranquille après un moment de réflexion ; du reste, nous le saurons bientôt.

— Que voulez-vous faire ? s’écria la jeune fille effrayée de le voir se lever.

— Aller au-devant de cet homme et lui demander ce qu’il veut, pas autre chose.

— Prenez garde, mon père !

— À quoi, mon enfant ?

— Si cet homme était un de ces bandits qui parcourent le désert.

— Eh bien ?

— Il vous tuerait peut-être.

Le Canadien haussa les épaules.

— Moi, me tuer, fillette, allons donc ! Rassure-toi, enfant, quel que soit cet homme, il ne me verra que si je le juge nécessaire, ainsi laisse-moi aller.

La jeune fille essaya encore de l’empêcher de s’éloigner, mais le Canadien ne voulut rien entendre. Se dégageant doucement de l’affectueuse étreinte de Carméla, il ramassa son rifle et disparut dans le fourré d’un pas si léger et si bien mesuré, qu’il semblait plutôt glisser sur un nuage que fouler l’herbe de la clairière.

Aussitôt qu’il fut au milieu des massifs de buissons d’où était parti le bruit de mauvais augure qu’il avait entendu, le chasseur, ignorant à combien d’individus il allait avoir affaire, redoubla de prudence et de précautions ; après une hésitation