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LES FRANCS TIREURS

— C’est cela, je ne me souviens plus du terme qu’ils ont employé.

— Position stratégique ?

— Juste.

— Oui, bâtie à l’époque de la conquête, l’hacienda est une véritable forteresse ; ses murs épais et crénelés, sa situation sur une hauteur qui ne peut être dominée et qui d’un côté commande les défilés des montagnes et de l’autre la vallée de los Almendrales, en font un point de la dernière importance et qui ne pourra être enlevé que par un siége en règle.

— C’est ce que tout le monde disait là-bas ; il paraît que c’est aussi l’avis du général Rubio, car la cause de tout le tumulte que j’entendais était l’arrivée d’une nombreuse troupe de soldats commandée par un lieutenant-colonel qui avait ordre de s’enfermer dans l’hacienda et de la défendre jusqu’à la dernière extrémité.

— Ainsi, voilà la guerre déclarée ?

— Parfaitement.

— La guerre civile, reprit tristement Tranquille, c’est-à-dire la plus horrible et la plus odieuse ; celle où les pères combattent contre les fils, les frères contre les frères, où amis et ennemis parlent la même langue, sont issus du même tronc, ont le même sang dans les veines, et pour cela même sont plus acharnés les uns contre les autres, et s’ entre-déchirent avec plus d’animosité et de rage ; la guerre civile, le plus horrible fléau qui puisse accabler un peuple ! Dieu veuille dans sa miséricorde qu’elle soit courte ; mais, puisque enfin la patience divine s’est lassée, que le Tout-Puissant a permis cette lutte fratricide, espérons que le droit et la