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LES FRANCS TIREURS.

éprouvait même une certaine difficulté d’élocution. L’interruption inattendue du chasseur le troubla tellement qu’il s’arrêta court sans qu’il lui fût possible de trouver un mot.

Tranquille, qui de longue main connaissait son compagnon, se hâta d’intervenir.

— Laissez-le conter à sa guise, dit-il au Cœur-Loyal, sans cela il lui sera impossible d’arriver au bout de son récit. Quoniam a une façon de dire les choses qui lui est particulière ; si on l’interrompt, il perd le fil de ses idées, alors il s’embrouille et il ne peut plus se reconnaître.

— C’est vrai, fit le nègre, je ne sais d’où cela provient, mais c’est plus fort que moi : dès qu’on m’arrête, c’est fini, tout se mêle si bien dans mon esprit que je ne m’y retrouve plus.

— Cela vient de votre modestie, mon ami, voilà tout.

— Vous croyez ?

— J’en suis sûr, ainsi ne vous inquiétez pas davantage et continuez en toute confiance, on ne vous interrompra plus.

— Je ne demande pas mieux que de continuer mais je ne me souviens pas où j’en étais resté.

— Aux informations que vous étiez parvenu à prendre, dit Tranquille en jetant au Cœur-Loyal un regard, que celui-ci comprit.

— C’est vrai ; voici donc ce que j’appris. La conducta de plata escortée par le capitaine Melendez avait été attaquée par les rôdeurs de frontières ou les francs tireurs ainsi qu’on les nomme à présent, et après un combat acharné, tous les Mexicains avaient été tués.