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Le repas fut court et silencieux.

Les quatre hommes mangeaient avec une voracité extrême.

Dès que les frijoles et la cecina eurent disparu, le Cèdre-Rouge et ses fils allumèrent leurs pipes et commencèrent à fumer tout en buvant de larges traits de whisky, mais toujours sans parler.

Enfin le Cèdre-Rouge ôta sa pipe de sa bouche et frappa un grand coup de poing sur la table, en disant brutalement :

— Allons, les femmes, décampez ! vous n’avez plus que faire ici, vous nous gênez, allez au diable !

Ellen et sa mère sortirent immédiatement et se retirèrent dans le compartiment qui leur était réservé.

Pendant quelques instants on les entendit aller et venir, puis tout retomba dans le silence.

Le Cèdre-Rouge fit un geste.

Sutter se leva et alla doucement appliquer son oreille contre la séparation ; il écouta quelques secondes en retenant sa respiration, puis il revint prendre sa place en disant laconiquement :

— Elles dorment.

— Alerte, mes louveteaux, fit à voix basse le vieux squatter, hâtons-nous, nous n’avons pas une minute à perdre, les autres nous attendent.

Alors il se passa une scène étrange dans cette salle sordide, éclairée seulement par la lueur mourante du foyer.

Les quatre hommes se levèrent, ouvrirent un grand bahut placé près de la cloison, et en sortirent divers objets de formes bizarres, leggins, mitanes, robes de bisons, colliers de griffes d’ours gris, bref, des costumes complets d’Indiens apaches.