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Le Cèdre-Rouge continua :

— By God ! je suis meilleur compagnon que vous, moi, car je vous apporte à manger, et ce n’a pas été sans peine que je suis parvenu à tuer ce maudit animal, je vous jure. Allons, allons, hâtez-vous d’en faire rôtir un quartier !

Sutter et Nathan n’avaient pas attendu l’ordre de leur père : déjà depuis longtemps ils étaient en train de dépouiller le daim.

— Mais, observa Nathan, pour faire rôtir ce gibier il va falloir augmenter notre feu ; et ceux qui nous surveillent ?

— C’est un risque à courir, répondit le Cèdre-Rouge ; voyez si vous voulez vous y exposer.

— Qu’en pensez-vous ? fit le moine.

— Moi, cela m’est parfaitement égal ; je veux qu’une fois pour toutes vous sachiez bien une chose : c’est que comme je suis intimement convaincu qu’un jour ou l’autre nous finirons par tomber entre les mains de ceux qui nous guettent, je me soucie fort peu que cela soit aujourd’hui ou dans huit jours.

— Diable ! vous n’êtes guère rassurant, compadre ! s’écria Fray Ambrosio. Le courage vous manquerait-il à vous aussi, du bien auriez-vous découvert quelques pistes suspectes ?

— Le courage ne me manque jamais ; je sais fort bien le sort qui m’est réservé : mon parti est donc pris. Quant à des pistes suspectes, ainsi que vous dites, il faudrait être aveugle pour ne pas les voir.

— Ainsi, plus d’espoir ! firent les trois hommes avec une terreur mal déguisée.

— Ma foi, non, je ne crois pas ; mais, ajouta-t-il avec un accent railleur, pourquoi ne faites-vous pas